25 ans du Téléthon : la face sombre

Publié le 30 Nov, 2011

Les 25 ans du Téléthon cette année ne doivent pas faire oublier l’analyse critique de cet évènement installé dans le paysage médiatique français.

 

Dernièrement, le biologiste Jacques Testart a renouvelé sa dénonciation de la sélection eugénique opérée, entre autres, avec les dons du Téléthon. Une analyse du document de promotion de l’AFM (1), “25 avancées spectaculaires au bénéfice du plus grand nombre“, paru cette année pour la 25e édition, conforte cette critique.         

Des recherches transgressives

 

Dans l’une des parties de ce document, intitulée “la révolution des biothérapies“, l’AFM valorise les avancées “spectaculaires” que constituent selon elle les recherches de thérapies cellulaires du coeur et de la peau à partir de cellules souches embryonnaires humaines. Pour la thérapie du coeur (traitement de l’insuffisance cardiaque post-infarctus), l’association évoque la perspective d’un futur essai clinique. Premier problème : cette annonce est régulièrement faite depuis 2 ans alors qu’aucune autorisation n’a encore été accordée dans la réalité.

 

Deuxième problème : ces recherches dont l’AFM fait la promotion s’écartent des prescriptions prévues par la loi. En effet, selon la législation en vigueur au moment où ces travaux ont commencé, la recherche sur l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires humaines est interdite et ne peut faire l’objet d’une autorisation, par dérogation, qu’à condition de “permettre des progrès thérapeutiques majeurs” et de ne pas pouvoir “être poursuivie par une méthode alternative d’efficacité comparable“. Or, il s’agit là de recherches fondamentales : elles sont dépourvues de validation pour passer à l’essai clinique et n’entrent donc pas dans l’exigence requise par la loi de permettre des “progrès thérapeutiques majeurs“.

 

De plus, des travaux alternatifs pour le traitement de l’insuffisance cardiaque, utilisant des cellules souches non embryonnaires, ont démontré une efficacité thérapeutique.

 

Concernant la thérapie cellulaire de la peau, l’AFM met en avant la reconstitution d’un épiderme humain à partir de cellules embryonnaires humaines, qui avait été fortement médiatisée en 2009. Le chercheur Marc Peschanski avait valorisé ces travaux destinés à traiter l’épidermolyse bulleuse, une maladie génétique rare de la peau, ainsi que les grands brûlés. Ces recherches étaient pourtant doublement transgressives. Elles se situaient uniquement, là encore, sur le plan fondamental.

 

Par ailleurs, plusieurs équipes avançaient vers des traitements à partir de cellules souches non embryonnaires. Le Pr. Américain John Wagner avait déjà présenté des résultats thérapeutiques positifs pour le traitement de l’épidermolyse bulleuse. En France, le Pr. Jean-Jacques Lataillade avait obtenu une reconstitution de la peau grâce à des injections de cellules souches de la moelle osseuse ou de cordon ombilical.

On ne sait toujours pas soigner mais on apprend à trier efficacement… ”             

 

 Sous le titre “la révolution génétique“, une autre partie du document de l’AFM évoque l’amélioration des diagnostics prénatals obtenue par la découverte des gènes responsables de maladies. L’AFM se félicite de cette avancée faisant reculer “l’errance diagnostique“: “Le conseil génétique et les diagnostics pré-natal et pré-implantatoire donnent la possibilité aux familles de s’agrandir en toute connaissance de cause. L’espoir et la vie reprennent le dessus !” Pour les couples susceptibles de transmettre une maladie génétique, ces diagnostics rendent certes possible d’identifier les embryons ou foetus

sains et d’éliminer ceux qui sont malades : ainsi, derrière les termes enthousiastes de l’AFM, c’est bien la réalité d’une sélection génétique des enfants à naître qui est à l’œuvre.

 

Dans un article intitulé “Téléthon : le plus cher cabaret du monde !” (2), Jacques Testart réprouve ce tri eugéniste. Il dénonce également  le caractère indécent de ce “spectacle de masse” et des “promesses éhontées” à partir desquelles s’effectue chaque année la collecte de millions d’euros “au nom de l’équation incontournable : argent=recherche=guérison“. Il observe que les promesses de guérison prochaine, sans cesse répétées, restent éloignées de la réalité difficile de maladies évolutives graves, d’autant que “la thérapie génique ne semble plus être une stratégie compétente pour guérir la plupart des maladies génétiques“. Il rapporte les propos, parus sur internet en 2008, d’une personne myopathe indignée pour qui les faux espoirs alimentés par le Téléthon “s’apparente vraiment à de la manipulation de masse“.

 

Jacques Testart fustige également l’hypocrisie de la présentation médiatique des “bébéthons“, destinés à valider le succès de l’opération. Nés de couples porteurs d’affections génétiques mais indemnes de ces maladies, ces enfants n’ont en réalité pas été guéris puisqu’ils n’ont jamais été malades. Ils ont fait l’objet d’une sélection : “les progrès du diagnostic génétique ont permis d’identifier les embryons ou foetus normauxconçus par les couples à risque, et ainsi d’éliminer les autres. On ne sait toujours pas soigner mais on apprend à trier efficacement… avec les sous de ceux qui avaient donné pour guérir“.               

 

1. Association française contre les myopathies, organisatrice du Téléthon

2. Site de Jacques Testart : http://jacques.testart.free.fr/index.php?post/texte897

 

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