La trisomie 21 est la « première cause de déficit intellectuel d’origine génétique ». Avec une incidence « proche de 1/2 000 naissances vivantes », elle est classée comme « maladie rare » (cf. Journée mondiale de la trisomie 21 : « La personne trisomique nous lance un vrai défi anthropologique »). En dehors de la « déficience intellectuelle d’intensité variable », les personnes porteuses de trisomie 21, ont certains risques accrus de malformations et comorbidités telles que le vieillissement précoce et la maladie d’Alzheimer. Pour le docteur Marie-Claude Potier, directrice de recherche à l’ICM, la trisomie 21 est une « maladie complexe ». En effet, le séquençage du chromosome 21 en 2000 « a révélé la présence de plus de 300 gènes, en trois copies dans la trisomie 21 ». Mais « l’expression de nombreux gènes n’est pas augmentée », grâce à « des effets de compensation qui restent à élucider ».
L’Académie nationale de médecine identifie « quatre fenêtres d’intervention » : « en prénatal, pour agir sur le développement précoce du cerveau », puis « chez l’enfant (de la naissance à l’adolescence), pour compenser les troubles cognitifs » et « chez le jeune adulte (20 à 40 ans), afin de détecter et traiter les syndromes dépressifs et autres comorbidités », et enfin « après 40 ans, pour prévenir les troubles de la maladie d’Alzheimer ». « 70 % des personnes trisomiques de plus de 65 ans auraient des atteintes de type Alzheimer, beaucoup plus que dans la population générale », estime le Dr Potier.
Des recherches dans plusieurs voies
Afin de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau des personnes trisomiques, « une équipe de l’ICM travaille à la création de modèles de souris avec le chromosome 21 humain ». L’objectif est aussi de « pouvoir évaluer des traitements et des molécules en prenant en compte toutes les interactions possibles ». Ainsi, une « thérapie à base de molécules qui régulent le gamma (molécule inhibitrice) » a été évaluée, indique le Dr Potier. « Le cerveau trisomique se caractérise notamment par un excès d’activité inhibitrice ».
Les scientifiques travaillent aussi à « identifier des cibles potentielles pour agir sur l’activité des neurones et améliorer des performances cognitives ». « Nous avons trouvé certains circuits spécifiques qui sont altérés dans les cerveaux trisomiques et qui ont une identité particulière (morphologique, anatomique, fonctionnelle) », indique Javier Zorrilla de San Martin, post-doctorant à l’ICM. Des travaux qui pourraient permettre d’envisager des interventions « autour de la naissance avec un rattrapage des retards de développement et chez le jeune adulte avec une compensation par des thérapies comportementales », estime le Dr Potier. Une de ses équipes travaille également « sur les biomarqueurs pour l’identification précoce des personnes à risque d’Alzheimer ».
Source : Le Quotidien du médecin, Elsa Bellanger (22/03/2021) ; Académie nationale de médecine (19/03/2021) – Photo : iStock