Sang de cordon : le retard coupable de la France

Publié le 24 Juin, 2008

Titulaire de la chaire Sanofi-Aventis innovation thérapeutique et vice-président de l’association Eurocord, plateforme internationale de recherche sur les cellules souches de sang de cordon, Grégory Katz revient dans Les Echos sur la pénurie de sang de cordon ombilical dont souffre la France, pourtant pionnière en la matière.

Au 16ème rang mondial en nombre de greffons par habitant (1 pour 10 000 en 2008), la France doit, chaque année, importer des greffons pour répondre à ses besoins : en 2007, 64% des greffons ont été importés ce qui représente une dépense de 3,7 millions d’euros pour l’assurance-maladie. Seul pays de l’OCDE à ne pas autoriser les banques privées sur son territoire, la France favorise ainsi "l’exode des bio-ressources" : plutôt que de voir incinérer le sang de cordon de leur enfant (considérées comme des déchets opératoires, les unités de sang placentaire sont quasiment tous systématiquement incinérés), certains parents choisissent de l’expatrier pour le stocker dans des pays voisins. "Le taux de natalité français étant le plus élevé d’Europe (816 000 naissances en 2007) et le taux de stockage de greffon étant un des plus faibles (environ 800 unités par an), la France est l’un des plus grands incinérateurs de sang de cordon parmi les pays de l’OCDE", note l’auteur.

Pour tenter de rattraper le retard que la France accuse dans ce domaine, l’Agence de la biomédecine a récemment lancé un appel d’offres pour financer, à hauteur de 900 K€, l’ouverture de nouvelles banques de sang de cordon ; la banque de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a été réouverte à la fin de l’année 2007 après avoir été fermée en 2002 par manque de financement. L’objectif est de stocker 10 000 greffons supplémentaires soit d’atteindre le taux de 1,6 greffon pour 10 000 habitants. En Espagne, l’objectif est d’atteindre, d’ici à 2015, le taux de 12 greffons pour 10 000 habitants… Pour Grégory Katz, "pour rattraper le retard français, les efforts publics devraient s’intéresser en priorité au prélèvement des greffons dans les maternités" et donc "structurer un réseau de maternités d’envergure nationale" (aujourd’hui six maternités sur tout le territoire diffusent une information détaillée sur le sujet), "former le personnel médical" et "informer le public".

Depuis la 1ère greffe mondiale de sang de cordon réalisée en avril 1971, près de 10 000 patients à travers le monde ont bénéficié de ce type de greffe. Le sang de cordon est d’ores et déjà utilisé dans près de 85 indications thérapeutiques (cancers du sang, thalassémies, drépanocytoses, maladies auto-immunes et maladies rares) et la liste de ses applications "pourraient à l’avenir porter sur les maladies cardio-vasculaires, les maladies neuro-dégénératives, l’ostéoporose, de nombreux cancers, des myopathies, des hépatites ou le diabète".

Dans un contexte où l’intérêt thérapeutique du sang de cordon ne semble pas être reconnu et où rien n’est fait pour qu’il puisse bénéficier aux patients, certains juristes s’accordent à dire que des familles ou des associations de patients pourraient se retourner contre les hôpitaux "pour perte de chance". "Il est indispensable que la puissance publique réagisse. (…) Ce rebond est aujourd’hui indispensable pour prévenir l’exode des bio-ressources, enrayer l’importation des greffons, et préserver un système d’égal accès aux soins fondé sur la solidarité", conclut l’auteur.

Les Echos 19/06/08

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