Rapport en faveur de la gratuité et de l’anonymat de la contraception pour les mineures

Publié le 16 Fév, 2012

Le 16 février 2012, le professeur Israël Nisand, chef du département de gynécologie-obstétrique du CHU de Strasbourg a remis à la secrétaire d’Etat à la Jeunesse et à la Vie associative, Jeannette Bougrab, un rapport intitulé "Et si on parlait de sexe à nos ados ?", proposant "la gratuité [et l’anonymat] de l’ensemble des moyens de contraception et des préservatifs jusqu’à 18 ans (et sous conditions de ressources de 18 à 25 ans) […] afin de prévenir les grossesses précoces". Selon ce rapport, co-signé par la gynécologue Brigitte Letombe et la psychologue Sophie Marinopoulos, les IVG chez les mineures augmentent de 1 à 5% par an, depuis 25 ans. En 2011, on comptabilise 90 000 avortements chez les moins de 25 ans.

Pour Israël Nisand, la contraception serait une méthode de "prévention" qu’il faudrait rendre gratuite et anonyme, comme l’est déjà l’IVG et la "pilule du lendemain". "Devoir passer par les parents pour obtenir la pilule est une aberration", note Sophie Marinopoulos, "Ils ne sont pas des interlocuteurs privilégiés à un moment où justement l’enfant cherche à s’autonomiser".
Aujourd’hui, le Planning familial distribue déjà gratuitement et anonymement la pilule, mais sa répartition n’est pas égale sur le territoire. Un "Pass contraception", gratuit et anonyme, avait aussi été mis en place dans plusieurs régions.

Le rapport appelle à "un effort conjoint" de la Sécurité sociale et des laboratoires pharmaceutiques pour rendre gratuite et confidentielle la contraception. Il prône la mise en place d’un "forfait contraception pour les mineures, auquel les laboratoires […] pourraient adhérer" et réclame "au gouvernement la gratuité de tous les contraceptifs pour les mineurs". Une feuille de soins anonyme viendrait compléter ce dispositif. "Ces contraceptifs seraient payés directement aux pharmaciens, à un prix qui serait de l’ordre de la moitié du prix de vente actuel", soit 7 euros par mois, expliquent les auteurs. Israël Nisand affirme avoir déjà pris contact avec plusieurs laboratoires, qui se disent "intéressés", dans la perspective de fidéliser un public en vendant certaines contraceptions à prix coûtant. Ce plan, qui reviendrait à 80 euros par an par adolescentes, serait censé être partiellement compensé par une potentielle baisse d’IVG.

Cependant, l’interprétation des chiffres en hausse est discutée. La chercheuse Nathalie Bajos émet l’hypothèse "d’une plus grande prise de risque" dans la sexualité des jeunes ou simplement d’ "un recours plus fréquent à l’avortement en cas de grossesse non prévue". Jeannette Bougrab dénonce également une "irresponsabilité collective".
Le rapport soulève aussi la question de l’influence et du rôle de la pornographie sur les adolescents. En effet, les chiffres révèlent que "près de 3 garçons sur 4 et plus d’1 fille sur 2 ont commencé à consommer de la pornographie avant l’âge de 14 ans". Israël Nisand déplore ce "véritable drame qu’on ne veut pas voir". Parmi les 18 propositions du rapport, les auteurs préconisent qu’aucune image pornographique ne puisse être visionnée sans donner un numéro de carte bleue et encourage à une forte taxation de l’exploitation et des ventes.
Enfin le rapport trace des pistes de "bonnes pratiques" pour les parents, l’école ou encore les médecins, et réclame que la loi de 2001 sur les 3 heures annuelles d’éducation sexuelle à l’école soit appliquée.

Marie-Noëlle Couderc, directrice de la Maison Tom Pouce, qui accueille des jeunes filles enceintes fait elle un tout autre constat : "Les jeunes en ont assez qu’on les angoisse". Selon son expérience auprès des établissements scolaires; il semblerait que "les adolescents sont devenus rétifs aux messages d’informations sur la sexualité, qu’ils ne veulent plus entendre". Les jeunes filles accueillies dans la Maison Tom Pouce se seraient plus souvent retrouvées enceintes "par une certaine désinvolture vis-à-vis de leur corps" que par "une méconnaissance de la contraception". Pour Marie-Noëlle Couderc, "Il est essentiel de promouvoir une prévention positive, de parler à ces jeunes d’amour, d’engagement, de leur corps, de la manière dont il fonctionne, de ce qu’ils souhaitent".
En 2011, Nora Berra, secrétaire d’Etat à la Santé, qui avait déjà manifester son opposition à légiférer sur le sujet, avait estimé qu’il "n’est pas nécessaire de passer par la loi".

Libération (Ondine Millot) 16/02/12 et Libération.fr 15/02/12 – Les Echos.fr (Chantale Houzelle) 16/02/12 – La Croix (Marine Lamoureux) 16/02/12 – Le Monde.fr 15/02/12 – Le généraliste.fr – L’Express.fr 15/02/12 – Femme actuelle.fr (Sabrina Nadjar) 15/02/12 – Santenews.eu (Sonia Arnaut) 15/02/12 – Santelog.com 14/02/12 – 20minutes.fr 15/02/12 – rmc.fr 15/02/12 – rtl.fr  – AFP (Julie Charpentrat) 15/02/12

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