Dix ans après l’arrêt Perruche, deux évènements ont récemment relancé la polémique sur l’indemnisation des personnes nées handicapées après une “erreur médicale ayant empêché leur mère d’avorter“.
La mère d’un enfant myopathe a saisi le Conseil constitutionnel pour contester le principe édicté par la loi du 4 mars 2002 qui dispose que “nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance” et que les parents sont les seuls susceptibles d’obtenir réparation mais “pas pour ‘les charges particulières découlant de ce handicap, tout au long de la vie de l’enfant“. Celles-ci relèvent en effet de la solidarité nationale selon la loi. Cette saisie est possible depuis le 1er mars 2010 avec l’entrée en vigueur de la question prioritaire de constitutionnalité (Cf. Synthèse de presse du 16/04/10). Des représentants d’associations de personnes handicapées ont réagi. Ainsi, Jean-Marie Barbier, président de l’Association des paralysés de France (APF) : “cette tentative de judiciariser la prise en charge du handicap est inacceptable. Je suis moi-même handicapé, et ce renvoi devant le Conseil constitutionnel, je l’entends comme l’affirmation qu’il aurait mieux valu que je ne sois pas né. Nous demandons la création d’un véritable revenu d’existence, indépendant des ressources de la famille. C’est une condition de la citoyenneté“.
La seconde affaire concerne le jugement rendu par le tribunal administratif de Nantes, le 7 avril 2010, qui a condamné le CHU de la ville à verser une indemnisation de 51 000 euros aux parents d’un enfant né trisomique en 1994 au motif que les médecins n’avaient pas proposé d’amniocentèse à la mère durant sa grossesse. L’hôpital de Nantes doit également verser 60 euros par nuit passée par l’enfant au domicile familial, depuis sa naissance jusqu’à la fin de sa vie (Cf. Synthèse de presse du 15/04/10). Philippe de La Chapelle, directeur de l’Office chrétien des personnes handicapées (OCH) a dit son indignation devant ce jugement : “Nuit après nuit, cet adolescent […] se voit ainsi rappeler que, si on avait su, il ne serait pas né, qu’il ne devrait pas être en vie […]. Avec lui, les personnes trisomiques s’entendent dire que leur vie est un préjudice, leurs parents se voient invalidés dans la gratuité de leur amour et de leur engagement quotidien“.
La Vie (Claire Legros) 06/05/10