Lucie Pacherie, juriste à la Fondation Jérôme Lejeune et porte-parole de la Marche pour la vie, a pris la parole lors de la 17e édition de la manifestation. Gènéthique reproduit son intervention.
Etonnant parallèle que l’actualité politique nous offre. Tandis que le Parlement discute de la Constitutionnalisation de l’avortement, le gouvernement organise le débat sur la légalisation de l’euthanasie. Certains ne voudraient y voir aucun lien et pourtant…
L’illusion de la maîtrise de la vie
Le débat sur la constitutionnalisation de l’avortement indique bien là où nous en sommes. En 50 ans, la suppression de la vie naissante in utero, est maintenant présentée comme une règle essentielle de l’organisation de notre société. S’il s’agit d’une absurdité juridique, cela montre combien la logique féministe a atteint son paroxysme. Débattre de constitutionnaliser l’avortement c’est en quelque sorte la cerise sur le gâteau qui manifeste que nous sommes arrivés à une totale maîtrise de la vie naissante. Les dizaines de lois sur l’avortement, ou encore les lois de bioéthique en sont les exemples éloquents. La technique s’est emparée du ventre des mères pour y placer l’enfant ou l’en retirer lorsqu’il n’est pas souhaité ou qu’il fait défaut. L’embryon humain est manipulé, modifié, trié, jeté, implanté, mesuré, avorté et parfois gardé. L’illusion de la maîtrise est totale au nom de la liberté ou encore de raisons médicales.
La vie naissante semble si bien maîtrisée, qu’il n’est pas étonnant que les militants de la vie contrôlée visent maintenant la vie finissante. Le président de la République Emmanuel Macron a ouvert il y a quelques mois en France le débat sur la légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté. Appui du comité consultatif national d’éthique, lancement d’une convention citoyenne, missions parlementaires, groupe d’experts pour lisser le sens des mots, tout est bordé pour aboutir à un projet de loi visant la légalisation de ce que les promoteurs de l’euthanasie appellent l’aide active à mourir. L’objectif, quoi qu’ils en disent : maîtriser la mort au nom de la liberté, de la dignité, ou pour des raisons médicales.
S’engager à la solidarité
Ce weekend, les 185 citoyens de la convention citoyenne sont réunis à quelques rues d’ici pour leur 4ème session. Ils sont formés pendant 9 weekends pour répondre en mars à la question de savoir si « le cadre de l’accompagnement de la fin de vie est adapté aux différentes situations individuelles rencontrées ou si d’éventuels changements devraient être introduits ». Début janvier, ils se sont déjà prêtés à un vote imprévu, qui affichait une tendance majoritaire pour modifier la loi.
Aujourd’hui, si nous sommes rassemblés c’est bien pour manifester que nous ne sommes pas dupes de ce simulacre de démocratie. Nous sommes ici 100 fois plus de citoyens qu’à la convention et nous exprimons un refus catégorique à la légalisation de l’euthanasie en France. Nous refusons l’idée de remettre en cause l’interdit fondamental de toute société qu’est l’interdit de tuer.
Ce débat sur la légalisation de l’euthanasie montre combien il est urgent de reposer des actes de solidarité, de prioriser l’accompagnement. La solitude, la souffrance, l’extrême fragilité, la grande dépendance sont autant de raisons qui poussent à demander la mort, pour en finir. C’est de notre responsabilité, à chacun, d’encourager, d’entourer, d’accompagner nos proches, avec l’aide des soignants formés pour soulager. Alors aujourd’hui prenons l’engagement de restaurer la solidarité dans notre cercle proche. Prenons l’engagement de restaurer notre regard sur les personnes les plus diminuées pour qu’elles aient toujours un sentiment de dignité et d’utilité. Il y a tout à faire autour de nous et chez les soignants, pour développer les moyens humains et médicaux nécessaires pour entourer nos mourants.
Un mystère est inhérent à notre humanité
Ce que l’on nous présente aujourd’hui dans ces débats parallèles c’est d’en finir avec le mystère de la Vie. Non, nous ne sommes pas des robots avec un bouton On et un bouton Off sur lequel appuyer au gré des volontés. Nous sommes des humains, empreints de mystère. Encore en 2023, personne, pas même la technique, ne peut dire quand la vie d’un nouvel être jaillira ou quand il rendra son dernier souffle. Ce mystère est le contraire de la toute maîtrise qui nous est proposée. Ce mystère est inhérent à notre humanité, et c’est bien ce mystère qui fait notre liberté et notre solidarité !
Photo : Pierre-Alain Greco