Lois de bioéthique : ce qui a changé

Publié le 3 Juin, 2008

Le sénateur UMP Francis Giraud, rapporteur pour la commission des affaires sociales, estime que le vote au Sénat des lois de bioéthique devrait se faire sans modification "l’Assemblée nationale n’ayant pas changé le texte que nous avons adopté en première lecture" rapporte le quotidien La Croix. De tels propos étonnent de la part du rapporteur …

Rappelons que ce projet de loi a été voté en première lecture au Sénat le 31 janvier 2003 puis adopté en deuxième lecture à l’Assemblée nationale le 11 décembre 2003. Or, le projet de loi de bioéthique discuté aujourd’hui au Sénat n’est pas le même que celui voté par le Sénat en première lecture. Voici les principales modifications apportées entre les deux lectures :

1/ Le texte remanié par les députés et présenté en seconde lecture au Sénat a fait l’objet d’un amendement qui permettrait non seulement de faire de la recherche sur les embryons surnuméraires "en stock" à la date de promulgation de la loi, mais également de faire de la recherche sur les embryons surnuméraires "à venir". Cette aggravation du texte, qui reviendrait à organiser l’approvisionnement d’un "flux" d’embryons pour la recherche, serait contraire à l’interdiction prévue de constituer des embryons à des fins de recherche.

Force est d’observer que l’autorisation d’effectuer des recherches sur les embryons surnuméraires – qui va constituer la principale modification de la loi bioéthique de 1994 – n’est appuyée d’aucune justification scientifique. Alors qu’il existe une méthode alternative reconnue, les cellules souches circulant chez l’adulte, il paraît exorbitant que la loi française envisage une disponibilité globale de ces embryons humains pour la recherche. Aucune donnée chiffrée sur le "stock" actuel de ces embryons candidats ne figure dans les rapports parlementaires, ce qui revient à délivrer une autorisation générale, à créer une disponibilité globale des embryons surnuméraires pour la recherche, mainmise dont la justification n’est pas établie, ne serait-ce que quantitativement. Selon les estimations, il y aurait entre 200 000 et 300 000 embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental, et chaque année, environ 35 000 nouveaux embryons seraient congelés. Ces chiffres demeurent approximatifs, aucune étude précise n’ayant été menée…

2/ Alors que la conception in vitro ou la constitution par clonage d’embryon humain à des fins de recherche, à des fins commerciales ou industrielles, seront interdites par la loi, s’agissant des fins thérapeutiques, l’interdiction ne porterait que sur la constitution d’embryon par clonage. Cette lacune permettrait donc de concevoir des embryons in vitro à des fins thérapeutiques et de les soumettre au diagnostic pré implantatoire (DPI) dans le but de sélectionner un embryon compatible avec une greffe cellulaire, c’est-à-dire de constituer un « bébé-médicament », en acceptant d’éliminer des embryons en bonne santé.

Aujourd’hui le texte soumis au Sénat en seconde lecture est plus permissif que celui qu’il avait voté en 1ere lecture. Les Sénateurs vont-ils limiter la recherche aux embryons surnuméraires déjà conçus et interdire le "Bébé-médicament" ? Beaucoup sont déjà prêts à céder devant l’accoutumance des esprits à ces nouvelles transgressions. Or c’est la première fois qu’en France on autoriserait la destruction d’êtres humains vivants pour les utiliser comme matériau… Une révolution en marche dans l’indifférence politique quasi générale… Et sans la moindre justification scientifique.

 

Pour une étude comparée des textes votés à l’Assemblée et au Sénat : consultez sur www.genethique.org, le dossier "lois de bioéthique" et les revues Gènéthique n° 36, 38, 48.

08/06/04

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