David Doat, du Centre Catholique des Médecins Français, s’interroge sur les promesses d’une vie illimitée présentée comme « inoffensive » voire « hautement souhaitable ». Pour lui, « les implications d’une illimitation des vies pourraient être bien plus questionnables qu’on voudrait nous le faire croire ».
L’espérance moyenne de vie est passée de 25 à 80 ans en trois siècles : « Jusqu’où nous conduit cette progression ? (…) Jusqu’à quel point désirons-nous vivre d’une vie naturelle illimitée ? A quoi ressemblerait le monde du soin dans une société ou le vieillissement et la mort ne seraient plus que les symptômes d’une maladie évitable ? » Dès aujourd’hui, « quel rôle fait-on jouer au soignant dans cette promesse annoncée (…) d’une société libérée du vieillissement et de la mort naturelle ? ».
Cette quête de l’immortalité pousse à identifier « maintien en santé » et « volonté d’en finir avec la mort ». Mais « est-on si sûr de l’inutilité, de l’absurdité et du non sens absolu d’une vie temporellement finie, qu’il puisse paraître si moralement bon et souhaitable de vivre d’une vie naturelle illimitée ? »
« Le simple fait de la fragilité de l’existence impose à tout pouvoir économique ou politique légitime des limites éthiques à l’exploitation des vies ». De même, « la possibilité de la mort, de la maladie ou du handicap exige de tout pouvoir démocratiquement constitué qu’il (…) reconnaisse aux individus une liberté inaliénable ». Mais « en l’absence de limite corporelles, serions-nous encore autonomes face aux pouvoirs qui sollicitent indéfiniment notre force de travail, de servir, de consommer » ? Plus profondément, « que deviendrait la dignité d’une vie indéfiniment prolongée, prolongeable et utilisable » ?
La Croix (25/05/2016)