Les soins palliatifs se développent en France sur un rythme lent

Publié le 23 Fév, 2015

Alors que le débat parlementaire est en cours sur les questions liées à la fin de vie, une interne de Santé Publique des Hospices Civils de Lyon, Anne-Claire Rosati, rappelle comment les soins palliatifs, à travers notamment l’accompagnement et la gestion de la souffrance, se sont peu à peu invités dans l’offre de santé en France.

 

Le 12 décembre dernier, une nouvelle proposition de loi « créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie », rédigée conjointement par les députés Alain Clayes et Jean Leonetti a été remise au Président de la République. Ce nouvel épisode interroge sur l’offre de soins palliatifs en France, et son efficacité.

 

Quelle définition ?

 

Selon une étude menée en 2009, 63% des français se disent mal informés sur les soins palliatifs. Rappeler la définition retenue par le gouvernement[1] n’est donc pas superflu : les soins palliatifs sont des soins « actifs, délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale ». Ils ont pour but de « préserver la meilleure qualité de vie possible jusqu’à la mort » et de « soulager la douleur, apaiser la souffrance psychique, sauvegarder la dignité de la personne malade et soutenir son entourage ».

 

Les débuts des soins palliatifs

 

C’est au XIXème siècle que l’accueil des patients atteints de maladies incurables commence à faire l’objet de structures spécifiques. C’est une jeune lyonnaise, Jeanne Garnier, qui après avoir perdu son mari et ses fils, décide en 1842 de consacrer sa vie à l’accueil de ces malades, en créant l’œuvre du Calvaire. Inspirée par son exemple, un hospice est créé dans le XVème arrondissement de Paris, l’actuelle maison Jeanne Garnier. Mais ces initiatives personnelles ne permettent pas d’impulser une dynamique nationale, ni un questionnement sur la prise en charge des personnes en fin de vie.

 

Les pays anglo-saxons se saisissent du sujet en créant des hospices (Dublin 1870, Londres 1905). Le Dr Ciceley Saunders met au point des protocoles antalgiques, étudie et fait connaître le maniement des morphiniques par voie orale. Ses travaux sont publiés en 1959 dans le Nursing Times puis dans The Lancet. Leur publication en France à la fin des années 70, pousse de nombreux soignants français à se rendre au Québec pour se former à la recherche clinique médicale et aux soins infirmiers, à la réflexion éthique, aux systèmes de bénévolat et à l’aide au maintien à domicile.

 

En France : la législation en faveur des soins palliatifs avance lentement

 

En 1973, en France, le ministère de la santé forme un petit groupe d’experts sur la fin de vie. Leur réflexion permet une prise de position officielle des pouvoirs publics en faveur du soulagement de la douleur, mais sans qu’elle se traduise par un changement effectif de politique.

 

En 1984, un article de la revue Etudes dénonce les pratiques d’euthanasie dans les hôpitaux en France et conduit la ministre Michèle Barzach à officialiser les soins palliatifs par la circulaire du 26 Août 1986 « relative à l’organisation des soins et à l’accompagnement des malades en phase terminale ». Celle-ci fût à l’origine de la création d’une première Unité de Soins Palliatifs (USP) en 1987 à l’hôpital de la cité universitaire à Paris, puis de lits d’hospitalisations, centre de consultations, équipes mobiles et hospitalisation à domicile pour les soins palliatifs.

 

15 ans plus tard, la loi du 24 juin 1999 dispose que « toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ».

 

Enfin, la loi du 22 avril 2005, dite « loi Leonetti », relative aux droits des malades et à la fin de vie, interdit l’obstination déraisonnable (l’acharnement thérapeutique). Elle introduit également la notion du double effet (un traitement visant à soulager le malade peut, à une certaine dose, avoir comme effet secondaire d’accélérer la mort),  la désignation possible d’une personne de confiance, ainsi que la rédaction de directives anticipées, valables 3 ans, non opposables au médecin.

 

Comment meurt-on en France en 2015 ?

 

Si les Français vivent plus vieux, en moyenne 85,4 ans pour les femmes et 79,2 ans pour les hommes en 2014, ils sont atteints d’une ou de plusieurs maladies graves et/ou chroniques, conséquences directes du vieillissement de la population. Les conditions de leur fin de vie ne sont pas bonnes. En effet, notre pays est classé 23ème du palmarès international établi par l’Economist pour la disponibilité des soins de fin de vie et la qualité de la mort. Seul un tiers des patients décédés en 2009 lors d’une hospitalisation et susceptibles de nécessiter des soins palliatifs, sont identifiés comme en ayant effectivement bénéficié.

 

58% des décès ont lieu à l’hôpital, bien que la majorité des français préfèrerait mourir à domicile. De ce fait, la fin de vie, d’un évènement familial et social est devenue une question médicale et hospitalière.

 

Anne-Claire Rosati

Interne de Santé Publique et Médecine Sociale

Hospices Civils de Lyon

 

[1] Cf. Fiche n°21 : Les soins palliatifs, Ministère des Affaires sociales, de la Santé, du Droit des femmes

 

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