Dans le quotidien Le Monde, Jacques Testart, biologiste de la procréation, directeur de recherche à l’Inserm, dénonce l’indifférence dans laquelle est élaborée le projet de loi sur la bioéthique.
Pour la recherche sur l’embryon, il estime que nul ne semble prendre en compte que cette possibilité, qui existe déjà en Grande-Bretagne depuis 1990, n’a donné aucun résultat intéressant. Il estime donc dérisoire de décider, au nom des progrès de la science, d’autoriser la recherche sur l’embryon humain.
Sur la question des "bébés médicaments" désormais autorisés au nom de la "solidarité intrafamiliale", il estime que l’on passe à une nouvelle définition de l’assistance médicale à la procréation (AMP) puisqu’elle n’avait jusqu’ici pour objet que de "remédier à l’infertilité.." ou "d’éviter la transmission à l’enfant d’une maladie…".
Il rappelle qu’il y a 25 ans, Robert Edwards, inventeur de la fécondation in vitro avait proposé une nouvelle technique à l’époque largement critiquée. Il s’agissait de provoquer dès la conception de vrais jumeaux afin de conserver l’un des 2 embryons comme réservoir de pièces de rechange compatibles avec son jumeau potentiellement malade."Pourquoi tant d’indignation à l’idée de faire deux embryons d’un seul, lequel existe déjà, alors qu’on s’apprête à créer délibérément un enfant salvateur ?" dénonce t-il à l’idée des bébés médicaments. Il craint que cette autorisation qui ne concerne que des couples susceptibles de transmettre une grave maladie ne s’étendent à des situations où la greffe parait tout autant justifiée.
"Aucune résolution éthique ne résiste à l’argumentation médicale" constate t-il. "L’éthique est soluble dans le temps, dans l’espace et dans la casuistique(de l’acquiescement "exceptionnel" pour un cas dramatique à son élargissement)" ajoute t-il.
Enfin, il estime dérisoire d’élaborer une loi au niveau national alors que nos activités relèvent de plus en plus de décisions européennes.
Le Monde 26/01/04