Les chromosomes sexuels, des « régulateurs génétiques influents »

Publié le 19 Déc, 2023

De nouvelles recherches menées par David Page, membre de l’Institut Whitehead et professeur de biologie au Massachusetts Institute of Technology, mettent en lumière le rôle des chromosomes sexuels en tant que « régulateurs génétiques influents ».

Ces travaux, publiés dans Cell Genomics [1], montrent en effet que les chromosomes sexuels influencent l’expression de « milliers de gènes présents sur d’autres chromosomes ». En augmentant ou en réduisant leur expression, ils ont un impact sur « les cellules de l’ensemble de l’organisme ». Une paire de gènes, ZFX et ZFY, est, à elle seule, responsable d’environ la moitié de ce comportement régulateur.

Un effet linéaire

Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs ont utilisé des échantillons de tissus provenant de personnes dont le nombre de chromosomes sexuels « varie naturellement » : les personnes nées avec un à quatre chromosomes X et de zéro à quatre chromosomes Y. Ces variations entraînent divers troubles, mais elles ne sont pas mortelles. « Nous avons pu modéliser mathématiquement l’impact du nombre de chromosomes X et Y sur l’expression des gènes d’une manière qui n’avait jamais été réalisée auparavant », affirme Adrianna San Roman, post-doctorante et coauteur de l’étude.

Les chercheurs ont examiné deux types de cellules qu’ils ont choisies « pour la facilité d’acquisition des échantillons » – les cellules lymphoblastoïdes, un type de cellule immunitaire, et les fibroblastes dérivés des cellules de la peau, qui contribuent à former nos tissus conjonctifs. Ils ont mesuré comment l’expression des gènes se modifiait dans chaque type de cellule avec « chaque X ou Y supplémentaire ». Ils ont ainsi pu mesurer des effets linéaires : chaque chromosome X ou Y supplémentaire modifie l’expression des gènes dans les mêmes proportions. En outre, en fonction du type de cellule, les gènes affectés étaient différents, de même que l’importance de l’effet.

X, Y : mêmes effets ?

Toutefois, pour un gène donné dans un type de cellule donné, « l’effet d’un X supplémentaire tendait à être similaire à l’effet d’un Y supplémentaire ». Cela a surpris les chercheurs, car les hommes et les femmes ont, par exemple, des risques différents de développer certaines maladies, des symptômes différents lorsqu’ils développent la même maladie, et des réactions différentes à certains médicaments (cf. Ce sont les chromosomes qui font de nous une femme ou un homme, « de la tête aux pieds »).

Les chercheurs pensent que certains gènes X et Y doivent modifier l’expression génétique de manière différente, ou à des degrés différents, pour expliquer les nombreuses différences sexuelles observées entre les cellules mâles et femelles. « Les effets sur le génome susceptibles d’expliquer les différences entre les sexes sont plus subtils que nous ne l’avions prédit », reconnaît Adrianna San Roman

X « actif » et X « inactif »

« Il existe en fait deux types de chromosomes X, et seul l’un d’entre eux diffère entre les hommes et les femmes », affirment les chercheurs suite à leurs travaux. Chaque être humain possède un chromosome « X actif », et ce chromosome n’a aucune incidence sur le sexe.

Ce qui diffère entre les hommes et les femmes, c’est le chromosome qui va de pair avec le « X actif » : les hommes ont un chromosome Y et les femmes un chromosome « X inactif », qui est génétiquement identique au X actif, mais dont la majorité des gènes sont désactivés.

Chez les personnes dont la composition des chromosomes sexuels est « atypique », tout chromosome X supplémentaire sera toujours un chromosome X inactif. Ainsi, lorsque les chercheurs ont mesuré l’effet de l’ajout de chromosomes X, ils ont en fait mesuré l’effet de l’ajout de chromosomes X inactifs.

Ainsi, ce sont les chromosomes X inactif et Y qui, plus précisément, modifient l’expression des gènes « à grande échelle ». En outre, tous deux régulent l’expression de nombreux gènes sur le chromosome X actif, tout comme ils le font sur l’ensemble des chromosomes.

 

[1] Adrianna K. San Roman et al, The human Y and inactive X chromosomes similarly modulate autosomal gene expression, Cell Genomics (2023). DOI: 10.1016/j.xgen.2023.100462

Source : Phys.org, Greta Friar,Whitehead Institute for Biomedical Research (15/12/2023) – Photo : iStock

Partager cet article

Synthèses de presse

Fin de vie : « Les propos décomplexés faisant l’éloge de "l’aide à mourir" sont dangereux et erronés »
/ Fin de vie

Fin de vie : « Les propos décomplexés faisant l’éloge de “l’aide à mourir” sont dangereux et erronés »

Dans une tribune, un collectif de psys réagit aux propos du président de la mutuelle MGEN qui énonçait que « le ...
Ohio : mère de trois enfants, mère porteuse de huit autres
/ PMA-GPA

Ohio : mère de trois enfants, mère porteuse de huit autres

Une femme de l’Ohio a donné naissance à des bébés en 2011, 2013, 2014, 2015, 2017, 2018, 2021 et 2022 ...
Des souris dotées d’un « cerveau hybride » détectent les odeurs avec leurs neurones de rat

Des souris dotées d’un « cerveau hybride » détectent les odeurs avec leurs neurones de rat

Des chercheurs de l'Université de Columbia ont créé des souris dotées d'un « cerveau hybride - mi-souris, mi-rat » ...

Textes officiels

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres