Les avancées de l’AMP, 30 ans après le 1er “bébé-éprouvette”

Publié le 22 Fév, 2012

Le 21 février 2012, à l’occasion des 30 ans d’Amandine, 1er "bébé-éprouvette" né en France, France 2 a proposé de revenir sur les techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP), à travers un documentaire intitulé "Un bébé nommé désir", suivi d’un débat en présence du Pr René Frydman, "père scientifique d’Amandine". L’émission, dont l’objet dépasse la FIV, fait le point sur l’avancée des recherches en matière d’AMP et prend position en faveur des mères porteuses ou d’autres sujets polémiques.

Le 24 février 1982, Amandine voyait le jour. Conçue par une fécondation in vitro (FIV), réalisée par le biologiste Jacques Testart et le Dr René Frydman, ancien chef du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart (Hauts-de-Seine), elle fut le 1er "bébé-éprouvette" français, 4 ans seulement après Louise Brown, 1er "bébé-éprouvette" au monde. Le Pr René Frydman est aussi à l’origine de la première naissance après congélation d’un embryon (1986), après congélation d’ovocyte (2010), après diagnostic préimplantatoire (FIV suivie de la sélection d’embryons indemnes de maladies héréditaires). En janvier 2011, il a réalisé la naissance du 1er "bébé-médicament" ou "bébé du double espoir", dont le sang du cordon a servi à une greffe de moelle sur sa sœur malade. L’AMP a ouvert de nombreuses possibilités, provoquant de grands débats éthiques, notamment sur le statut de l’embryon humain, sujet aux manipulations et à la destruction.
Ce champ de la médecine a connu en France une évolution importante : depuis la 1ère fécondation in vitro (FIV), 200 000 bébés sont nés via cette technique et près de 22 000 naissent par AMP chaque année. Cet essor s’est accompagné d’une augmentation du nombre de jumeaux et de triplés, car dans le cadre de la FIV, les médecins implantent plusieurs embryons dans l’utérus de la mère, afin d’optimiser les chances de réussite, généralement estimées à 20%.

Interrogé dans le quotidien Le Monde, le Pr Frdyman revient sur les progrès de l’AMP et sur des questions éthiques qui y sont liées. Pour lui, la médecine reproductive a bouleversé la famille traditionnelle : "Nous aboutissons à des parentalités multiples. […] Il y a la mère qui va donner les ovules, qui peut être différente de celle qui va porter l’enfant, qui peut être encore différente de celle qui va élever l’enfant. Le père biologique, qui donne son sperme, peut aussi être distinct de celui qui élève l’enfant". Il estime que c’est "la relation humaine [qui] prime, et pas l’origine génétique". Mais lorsqu’on évoque le fait que certains enfants nés d’un don de gamètes demandent à connaître leurs origines biologiques, ce qui n’est pas possible en France, le Pr Frydman prône une liberté de choix des donneurs : "que ceux qui le souhaitent puissent rester anonymes, et que ceux qui veulent bien laisser leur identité puissent le faire. Vingt ans plus tard, l’enfant qui le souhaitera pourra connaître l’identité du donneur, à condition que celui-ci ait donné son accord. Sinon, l’enfant subira le lot de ceux dont le père est parti sans laisser d’adresse. On ne peut pas répondre à toutes les situations".
Le Pr René Frydman affirme ne pas regretter les avancées de la médecine procréative, bien qu’il "condamne l’utilisation des techniques sans éthique". Il dénonce par exemple la sélection en fonction du sexe de l’enfant à naître. Pour lui, "Cette volonté de façonner l’enfant pose problème".
Par ailleurs, il explique aussi être hostile au recours aux mères porteuses, cette technique consistant pour lui à exploiter le corps de la femme : "De même qu’on s’oppose à la vente d’organes, on doit s’opposer à la grossesse pour autrui. La vente ou la location, c’est la même chose. Où qu’il se pratique, ce geste est quasiment toujours rémunéré. On entre dans un processus d’exploitation". Quant à l’intérêt du bébé ou de la "mère porteuse", il souligne que leur séparation à la naissance "n’est pas sans risque". Pour René Frydman, vouloir à tout prix "avoir un enfant génétiquement de soi" n’est pas "une raison suffisante".
Il reconnaît enfin que les avancées de l’AMP a fait naître une revendication d’un "droit à l’enfant", l’idée que "tout est possible" : ainsi, "l’âge, le fait d’être célibataire ou même d’être vivant ou mort (avec l’insémination artificielle post mortem) ne constituent plus des limites". Pourtant, René Frydman souhaite innover en proposant aux femmes de 33 à 35 ans un bilan de fertilité pour pouvoir, si la fertilité d’une femme baisse, "congeler ses ovules pour qu’elle puisse les utiliser plus tard".

Quant à d’autres avancées qui pourraient effrayer du fait de leurs graves conséquences, comme la possibilité de concevoir un bébé à partir des gamètes mâles et femelles d’un seul individu (qui seraient alors obtenus par reprogrammation de cellules souches embryonnaires) ou celle de procréer hors du corps humain, René Frydman émet un avis mitigé : "Beaucoup de choses sont possibles, elles ne sont pas forcément utiles ou souhaitables. Tout ce qui est faisable ne se réalisera pas, ou seulement de façon ponctuelle et limitée. […] Dans toute innovation, il y a une part de risque. Si vous le supprimez, il n’y aura plus d’innovation. Ce qui compte, c’est que ce soit transparent, que le risque soit énoncé et accepté".

Le Monde.fr (Gaëlle Dupont) 19/02/12 – Elle.fr 21/02/12 – Figaro 21/02/12 – Nouvelobs.com 20/02/12 – Linternaute.com 20/02/12 – AFP 20/02/12 – 20minutes.fr (Alice Coffin) 20 et 21/02/12 –  Europe1.fr 21/02/12 – auféminin.com (Emilie Rousseau) 21/02/12 – républicain-lorrain.fr 21/02/12 – Lyon.france-webzine.com (Damien Renoulet) 20/02/12 – Paris-normandie.fr (Romain Schué) 17/02/12 – TVmag.lefigaro.fr 21/02/12 – famili.fr 21/02/12

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