L’Elysée, le CCNE et la bioéthique

Publié le 7 Mar, 2008

Jean-Yves Nau s’inquiète du sort réservé au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), après que l’Elysée ait déclaré vouloir en redéfinir les missions et la composition.

Créé en février 1983, "dans l’indifférence générale", par François Mitterrand, cet organisme indépendant s’est, depuis, montré indispensable face aux interrogations soulevées par le "foisonnement des sciences du vivant" et la "médicalisation grandissante des deux extrémités de la vie humaine". Il a ainsi publié plus d’une centaine d’avis sur la fin de vie, les techniques de l’assistance médicale à la procréation (AMP), la pilule abortive RU 486, la lutte contre le sida, la toxicomanie, la contraception, le diagnostic préimplantatoire… "Il s’est fort raisonnablement refusé à trancher quant au fait de savoir si l’embryon humain, fécondé ou non in vitro, était "une personne humaine potentielle" ou une "potentialité de personne humaine"", ajoute le quotidien.
Le CCNE a aussi accompagné les réflexions menées autour de la rédaction de la loi relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales (1988) et des lois de bioéthique (1994 et 2004), qui devraient être révisées en 2009.

Jean-Yves Nau estime que "ces publications ont largement marqué une époque caractérisée par de profonds bouleversements dans la relation entre les médecins et leurs patients, par la judiciarisation croissante de la pratique médicale ou encore par l’inscription dans la loi de droits pouvant être revendiqués par les malades". A tel point que, "de l’avis général", "l’actuel CCNE constitue un modèle pour une institution équivalente qui pourrait demain œuvrer à l’échelon international".

Pourtant, l’Elysée a récemment déclaré que le CCNE avait "perdu en notoriété et en visibilité par rapport à d’autres instances", exprimant par là sa volonté de réformer l’institution (cf. Synthèse de presse du 30/01/08). Alain Grimfeld, fraîchement nommé à la présidence du CCNE, veut rassurer ceux qui craignent une mainmise de l’Elysée sur ce comité : "il ne s’agit bien évidemment pas d’être soumis à l’Elysée. Ceci n’aurait aucun sens. Et si une restructuration doit être entreprise, elle ne pourra l’être qu’avec l’aval du Parlement". "On reproche au CCNE de ne pas être assez constructif, de ne pas être assez dans le siècle. L’Elysée souhaite aussi que, à l’avenir, chaque fois qu’une loi sera élaborée, un volet éthique correspondant soit abordé. Nous allons analyser entre nous, calmement, ces questions, pour pouvoir faire des propositions de réforme qui s’inscriront dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique en 2009. Nous ne sacrifierons pas l’éthique à des considérations politiques", poursuit-il.

Le Monde (Jean-Yves Nau) 07/03/08

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