Le quotidien La Croix publie une tribune de Danielle Moyse, chercheuse associée à l’Iris, au CNRS, à l’Inserm et à l’EHESS, dans laquelle elle met en parallèle la sélection des naissances en fonction du sexe et la sélection liée à l’état de santé de l’enfant à naître, selon qu’il est atteint ou non, notamment, de la trisomie 21.
Pour certains, cette comparaison n’a pas lieu d’être puisque la trisomie 21 est un "handicap", une "maladie", tandis que le fait d’être "fille" n’en est pas. Ce à quoi Danielle Moyse répond que ces deux formes de sélection ont déjà en commun d’être des détournements du dépistage prénatal. Mais la chercheuse va plus loin en expliquant que "la féminité ne suppose aucune […] altération fonctionnelle", "il n’en demeure pas moins que l’infériorisation très répandue des femmes fait probablement encore [de la féminité] le premier "handicap" dans le monde" puisqu’elle reste un des motifs les plus courants de "restrictions de participation" à la vie sociale. En ce sens, la féminité devient donc un "handicap" quand le contexte lui est contraire.
Pour ce qui est de la trisomie 21, elle reste objectivement une "déficience", quelque soit le contexte ou l’accompagnement adéquat mis en place. Mais Danielle Moyse interroge : "est-ce la "déficience" qui rend la vie invivable ou le rejet, la négligence et la domination qu’elle occasionne ?"
Pour la chercheuse, les femmes et les personnes trisomiques 21 mettent "pareillement à l’épreuve une humanité qui ne se mesure pas à sa capacité de tout contrôler, mais au sort qu’elle réserve à ceux qui, pour une raison ou une autre, n’ont pas, ou n’ont plus, le pouvoir".
La Croix 14/02/12