La CEDH se prononce sur le droit à la vie de l’enfant à naître

Publié le 10 Oct, 2016

La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a rendu ce jour un arrêt traitant du décès d’une femme enceinte et de son bébé à naître de 9 mois. La femme enceinte, prise de difficultés respiratoires, était arrivée aux urgences et décédée quelques heures plus tard. Une césarienne post-mortem avait été effectuée, mais le bébé était mort-né.

 

Le mari et les autres enfants de la femme ont attaqué le ministère de la santé turc en faisant valoir que la mère et l’enfant étaient morts des suites de fautes commises par le personnel soignant de l’hôpital (défaut d’attention des médecins au moment de l’auscultation, erreur de diagnostic, administration d’un mauvais médicament puis défaut de soins faute de paiement comptant des frais médicaux). Ils affirment que l’État turc n’a pas satisfait à son obligation positive de protéger le droit à la vie.

 

Il est ainsi demandé à la CEDH de se prononcer sur la violation du droit à la vie de la femme enceinte et du droit à la vie du bébé à naître.

 

Dans leur arrêt, les juges de Strasbourg cherchent à éviter de se prononcer frontalement sur le droit à la vie de l’enfant à naître. Ils rappellent que la CEDH ne souhaite pas se prononcer sur le point de départ de la vie humaine ni trancher si l’enfant à naître est une « personne » au sens de la Convention Européenne des Droits de l’Homme : « La Grande Chambre a considéré que, en l’absence d’un consensus européen sur la définition scientifique et juridique des débuts de la vie, le point de départ du droit à la vie relevait de la marge d’appréciation que la Cour estime généralement devoir être reconnue aux États dans ce domaine. La Grande Chambre a ainsi estimé qu’« il n’est ni souhaitable, ni même possible actuellement de répondre dans l’abstrait à la question de savoir si l’enfant à naître est une « personne » au sens de l’article 2 de la Convention (idem, § 85) »[1].

 

Les juges de Strasbourg estiment que le droit à la vie de l’enfant à naître est lié au droit à la vie de la mère et qu’il n’y a donc pas besoin d’examiner de manière séparée le droit à la vie du fœtus : « La vie du fœtus en question était intimement liée à celle de Mme Leyla Karataş et dépendait des soins prodigués à celle-ci. Or cette circonstance a été examinée sous l’angle de l’atteinte au droit à la vie de cette dernière. Partant, la Cour estime que le grief des requérants à cet égard n’appelle pas un examen séparé »[2].

 

Si la CEDH souhaite lier le droit à la vie de la mère et le droit à la vie de l’enfant à naître, elle se prononce donc sur le droit à la vie du fœtus en se prononçant sur le droit à la vie de la mère.

 

Dans l’affaire, la CEDH conclut à une violation du droit à la vie de la mère sous son volet procédural (l’institut médicolégal et les juridictions administratives turques n’ont pas fait assez de recherches pour déterminer les circonstances du décès et responsabilités de chacun) et donc à une violation du droit à la vie de l’enfant à naître sous ce même volet procédural.

 

[1] Paragraphe 123 de l’arrêt.

[2] Paragraphe 125 de l’arrêt.

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