Dans son ouvrage La Fin de l’individu, voyage d’un philosophe au pays de l’Intelligence artificielle, « une enquête, fruit de 125 entretiens avec des spécialistes pour la majorité américains et chinois », le philosophe et essayiste Gaspard Koenig « s’inquiète du nouveau monde proposé par les nouvelles technologies ».
Pour le philosophe, l’intelligence artificielle est un sujet « intimidant » parce que « les gens dans ce milieu ont un tel niveau de connaissance qu’il est difficile d’avoir un droit de parole sur le sujet ». « Pourtant, il importe d’apporter une pensée critique », estime-t-il. Pour Gaspard Koenig, en France, « les débats intellectuels sont pauvres », opposant parfois « schématiquement les technophiles gagas et les technophobes apocalyptiques » car on pense que l’intelligence artificielle « reste un domaine de pointe, alors qu’elle intervient dans toutes les applications ». Mais pour l’essayiste, « nous nous situons dans un moment comparable à celui où la machine à vapeur a été inventée et qui a changé radicalement les rapports sociaux et la pensée ».
La question majeure est celle du libre arbitre, remise en question par l’intelligence artificielle selon Gaspard Koenig. Entre « une application qui permet de trouver un emploi sans avoir à poser sa candidature » et « la liberté d’expression de plus en plus décidée par les ingénieurs de Facebook », « tout choix volontaire n’est peut-être pas libre », estime-t-il. Et « nos libertés fondamentales sont peut-être menacées d’obsolescence ».
Jugeant qu’« au niveau des États, la réflexion est trop superficielle », le philosophe appelle à « faire preuve de stoïcisme, couper avec ce qui peut relever de l’addiction » au niveau individuel. « Il s’agit de créer de la responsabilité, de l’individualité et de la délibération ».
Pour aller plus loin :
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La Vie, Pascale Tournier (17/03/2020)