Avec Melody, Bernard Bellefroid signe un film réaliste sur un sujet sensible, celui de la GPA. Ni plaidoyer, ni réquisitoire, le film, raconte une histoire qui se déroule à nos portes, celle une jeune française, coiffeuse à domicile, sans domicile fixe, qui rêve de s’acheter un salon de coiffure, et qui offre ses services via un site Internet à une richissime Anglaise.
Entre Melody, née sous X, et Emily, la femme d’affaire à qui rien ne coûte, tout juste remise d’un cancer qui ne lui laisse plus la possibilité d’être mère, les destins se croisent : le désir tenace d’être adoptée de Melody qui doit abandonner l’enfant qu’elle porte à la naissance, se mêle à celui d’Emily, qui « se fabrique » un enfant pour elle-même, obsédée par un désir de maternité. En les mettant l’une face à l’autre, le cinéaste les confrontent et elles passeront à plusieurs reprises de la rivalité : « C’est mon enfant » « C’est moi qui le porte », à la tendresse.
Le film, parfois cru, n’élude pas les questions, les risques pour la mère porteuse, les raisons économiques qui motivent la mise à disposition de son corps, la question de la filiation et de l’héritage. Il ne cache pas non plus les souffrances que génère cette situation : Melody, qui apprend à être mère, veut s’enfuir pour garder le bébé. Emily la surprend à rire dans son bain alors qu’elle parle « à son ventre » et les traits de l’Anglaise se figent devant cette complicité que tout l’or du monde ne lui donnera jamais. Et dans cette histoire qui ne devait être que contractuelle, un simple échange de service moyennant rémunération, rien ne se passera comme prévu. Les deux femmes seront malgré elles entraînées dans un engrenage, une suite d’évènements qui se disputent déjà l’avenir de l’enfant qui doit naître.
Enfin, la figure masculine est complètement éludée : la GPA est une histoire de femmes qui se passe entre deux femmes. Rien n’est dit du donneur de sperme qui n’est même pas évoqué ! Le seul homme à apparaître est le frère d’Emily. Il l’a incitée à avorter au moment de la découverte de son cancer, « la décision qui s’imposait », sans doute pas celle qu’Emily aurait voulu prendre. Il sera écarté à dessein de toutes les décisions importantes qui jalonneront la fin du film.
Si le film se termine sur une pirouette, une sorte d’happy end, le spectateur reste perplexe : « De qui est cet enfant ? Qui est sa mère ? » Une question qui s’invite jusqu’à l’ultime image, où les deux femmes se mêlent encore autour du nouveau né.