"Enceintes et malades", telle est la thématique du dossier réalisé par le quotidien La Croix dans son édition du mardi 5 juin 2012.
Selon l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), "l’utilisation des médicaments doit être limitée au cours de la grossesse". Cependant, Sophie Gil, biologiste et professeur à l’Université Paris-Sud, souligne que des traitements peuvent être indispensables pour certaines femmes enceintes comme "les personnes atteintes de maladies bénignes, mais qui, si elles sont mal soignées, peuvent être très graves". Il en est de même pour les "femmes souffrants de pathologies lourdes qui ne peuvent se passer d’un traitement au long court". Dans ces situations, "l’absence de traitement est plus dangereuse que la prise de médicaments", rappelle la biologiste.
Notons cependant que ces dernières années, "des progrès ont été faits dans la connaissance des médicaments et de leurs effets". Ainsi, en France, "la prise en charge des futures mères atteintes du sida est […] une grande réussite puisque la transmission du virus à l’enfant a quasiment disparu".
Pour ce qui est des cancers diagnostiqués pendant la grossesse, il n’y a pas de prévention possible. Cependant, le Professeur Philippe Morice, chef du service de Chirurgie gynécologique à l’institut Gustave-Roussy de Villejuif, précise que s’il y a vingt ans, lorsqu’un cancer était diagnostiqué, "on préconisait le plus souvent une interruption médicale de grossesse […] aujourd’hui, on sait […] que la grossesse n’aggrave pas le cancer et qu’une patiente peut, à partir du deuxième trimestre, suivre une chimiothérapie sans mettre son bébé en danger", même si dans le cas "de cancers très agressifs, découverts en début de grossesse […] il arrive encore […] qu’une IMG soit préconisée parce que la vie de la mère en dépend." En effet, Danièle Evain-Brion rappelle que "dans les premières semaines de la grossesse, le placenta est en plein développement ". Par conséquent, "les traitements anticancéreux risquent de perturber cette étape clé". En revanche, on sait aujourd’hui, qu’au cours du "quatrième mois de grossesse, [le placenta remplit] son rôle de filtre et [protège] le fœtus des médicaments".
Aujourd’hui, des perspectives de recherche existent. Ainsi, Sophie Gil précise qu’en "mimant la circulation sanguine à partir de placentas recueillis auprès de femmes qui viennent d’accoucher, on peut tester l’effet précis de telle ou telle molécule". Ces recherches sont d’une grande importance car selon la psychiatre Sarah Dauchy, "les femmes concernées oscillent entre le bonheur de pouvoir mener leur grossesse à terme et la peur de la toxicité, pour le bébé, des médicaments qu’elles sont obligées de prendre". En outre, il est important que ces mères "soient suivies pour éviter que cette expérience ne pèse sur le lien avec leur enfant ".
La Croix (Marine Lamoureux) 05/06/12