Aux Etats-Unis, on estime à plus de 500 000 le nombre d’embryons congelés, « non utilisés par les familles souhaitant pratiquer une fécondation in vitro ». En France, « les rapports d’activité ne sont pas renseignés depuis 2010 et d’après un audit de l’Agence de Biomédecine, les registres ne sont même pas tous numérisés ».
Depuis peu, aux Etats Unis, ces embryons sont proposés à la vente aux couples souffrant de double infertilité, au prix de 20 000 dollars. Il s’agit d’« un nouveau produit sur le marché » qui entraine « une nouvelle forme d’esclavage », déclare le docteur Alexandra Henrion-Caude, généticienne et directrice de recherche à l’Inserm à l’Hopital Necker. A la différence que les esclaves connaissaient leurs origines. «Ici, on nie l’humanité à ces embryons humains qui deviennent l’objet d’une offre supplémentaire sur un marché économique ». « Quel regard l’enfant, même aimé, portera sur ceux qui l’ont acheté 20 000 dollars ? » s’interroge Alexandra Henrion-Claude.
« Nous sommes tous concernés et ce n’est évidemment pas une affaire de spécialiste », insiste-t-elle. « En tant que scientifique co-responsable au nom de ma communauté, mais aussi en tant que mère, je souffre de notre indifférence vis-à-vis de ces millions d’embryons dont la vie est cryo-conservée. Ces vies ne sont elles donc pas nos responsabilités ? Ne devons nous pas réfléchir à ces vies mises artificiellement en ‘pause’. On pourrait les décrire dans une sorte de ‘coma réfrigéré’».
Alors que ces embryons sont mis sur le marché aux Etats Unis, en France, l’Agence de Biomédecine sous le contrôle du Ministère de la Santé banalise le don de gamètes à travers une campagne radio (cf. Gènéthique du 5 juin et du 8 juin). « Autrement dit, alors même que nous sommes dans l’embarras de gérer ces centaines de milliers d’embryons dans leurs containers, nous nous permettons d’en générer davantage… une aberration supplémentaire. »
Note de Gènéthique : En France, un couple ayant eu recours à la FIV a la possibilité de donner ses embryons surnuméraires quand le « projet parental » n’a plus de suite. Les autres « options » sont l’« arrêt de conservation » ou le « don à la recherche » (cf. Gènéthique du 2 juin 2015).
Atlantico (05/07/2015)