Le journal La Croix, qui consacre un dossier spécial sur la bioéthique, a interviewé diverses personnalités pour connaître leur position en matière de recherche sur l ‘embryon.
Jacques Testart, biologiste et directeur de recherche à l’Inserm rappelle tout d’abord qu’il y a en France 100 000 embryons surnuméraires et qu’il s’en ajoute 1000 de plus chaque mois. Il ne se déclare pas hostile dans l’absolu à des recherches sur ces embryons qui sont à ces yeux voués de toute façon à la destruction mais dans le respect de bonne pratique scientifique. Il insiste par exemple sur les recherches animales qui doivent être parfaitement au point avant de passer à l’expérimentation sur l’homme. En matière de cellules souches, il déplore que l’on explore pas tout d’abord des voies qui ne posent pas de problèmes éthiques comme la recherche sur les cellules souches adultes. Il dénonce que derrière le débat sur l’embryon, se cachent des arrières pensées mercantiles.
Le philosophe François Dagognet estime pour sa part qu’il n’y a pas de raison de s’opposer à la recherche sur l’homme quand celle-ci vise à aider l’homme. Il soumet donc l’acceptabilité des recherches sur l’embryon à leur finalité.
Monette Vacquin, psychanalyste, estime dans un premier temps que la congélation des embryons humains s’imposait comme un seuil à ne pas franchir. Elle souligne que la médecine a conduit à la constitution de deux humanités parallèles, déterminées par la toute puissance du « projet parental ». Certains embryons deviendront des « personnes », d’autres seront relégués au rang de « chose ». « L’embryon est une figure de l’altérité, c’est la matérialisation de l’alliance de l’homme et de la femme, un support identificatoire à notre passé et une ouverture vers l’avenir » conclut-elle.
Enfin Monseigneur Jean-Louis Bruguès interrogé sur le respect de l’être humain rappelle que « certains ne reconnaissent la dignité de la personne que sous des conditions restrictives : cette dignité paraîtrait et disparaîtrait, en fonction des circonstances, ou plutôt de l’attitude du corps social : ainsi le projet parental conférerait la dignité, c’est à dire l’humanisation, à l’embryon. Pour les chrétiens la dignité est une qualité intrinsèque à l’être humain : l’être humain doit être respecté comme une personne dès le premier instant de son existence » Il conclut en affirmant « la dignité ne se marchande pas, ne se discute pas. Sinon, on établit des catégories entre les hommes, les sous-hommes et les autres… ».
La Croix (Marianne Gomez – Isabelle de Gaulmyn) 15 /01/02