Le rapport attendu des académies américaines de médecine et de sciences sur l’édition du génome a été rendu public mercredi. S’il invite à une certaine prudence face aux manipulations du génome humain, il n’interdit pas les modifications touchant la lignée germinale. Il laisse la porte ouverte « aux modifications du génome humain pour lutter contre les maladies génétiques, soumises à une surveillance rigoureuse », alors qu’en décembre 2015, les experts réunis à Washington avaient jugé ces pratiques « irresponsables ».
L’ « édition du génome », rendue accessible avec l’outil CRISPR « transforme déjà la recherche », mais soulève de vastes questions éthiques concernant la modification des gamètes et des embryons humains. « Si les scientifiques apprennent à modifier en toute sécurité le code génétique », le rapport estime que l’ « édition germinale pourrait être tentée pour traiter des maladies graves, s’il n’existe pas d’alternative ».
« La prudence est absolument nécessaire, mais être prudent ne signifie pas interdire » a déclaré le bioéthicien R. Alta Charo de l’université de Wisconsin-Madison. Il a poursuivi en expliquant que « le comité ne dit pas que nous devrions ou ne devrions pas faire de l’édition du génome qui modifierait la lignée germinale. Nous disons simplement que nous pouvons identifier un ensemble de conditions strictes en vertu desquelles il serait permis de le faire ». Il a toutefois tempéré son propos en déclarant que « nous sommes loin, très loin d’être prêts à essayer ». Parmi les « conditions strictes » évoquées, l’édition du génome « ne devrait pas aller au-delà du traitement de maladies graves », soit permettre la conception de « bébés à la carte » (cf. Face à la sélection toujours plus active des naissances, la puissance subversive du handicap).
Ce rapport est considéré comme « une étape vers la création de normes internationales pour le développement responsable de cette puissante technologie ». S’il a été salué par un certain nombre de chercheurs, Marcy Darnovsky du Center for Genetics and Society l’a qualifié de « troublant » et « décevant », car il « constitue un feu vert pour la poursuite des tentatives de modifications de la lignée germinale humaine » (cf. CRISPR : « On s’habitue à tout, y compris à la menace de la transgression »).
Reuters, Julie Steenhuysen (14/02/2017); Phys.org, Lauran Neergaard (14/02/2017)
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