DPN : une politique de traque…

Publié le 16 Mar, 2009

Dans Liberté Politique, Pierre-Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon, revient sur les propos de Didier Sicard, qui en février 2007, parlait de la montée de l’eugénisme en France (cf. Synthèse de presse du 05/02/07). Le  professeur Sicard était l’un des invités de l’Académie pontificale pour la Vie pour son colloque international sur "les nouvelles frontières de la génétique et le risque de l’eugénisme" organisé à Rome les 20 et 21 février dernier. Au cours du colloque, il a réitéré ses craintes à l’encontre du système de dépistage pratiqué en France.

Alors que l’article 16-4 du Code civil mentionne que "toute pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes est interdite", force est de constater que le dépistage ne cesse d’augmenter. Le dernier rapport de l’Agence de la biomédecine nous apprend qu’il y a eu, entre 2005 et 2006, une augmentation de plus de 10% des interruptions médicales de grossesse (IMG) : 6 787 en 2006 contre 6 093 en 2005.

Pour illustrer ses propos, Pierre-Olivier Arduin prend l’exemple de la trisomie 21, pathologie pour laquelle 96% des embryons dépistés sont avortés. Alors que le dosage de deux nouveaux marqueurs sériques dès le premier trimestre de la grossesse est en train de voir le jour, deux nouvelles méthodes, l’une américaine, l’autre française, pourraient affiner encore ce dépistage. La généralisation de ce genre de techniques permettra le dépistage du handicap a un stade très précoce, dans un temps où la femme pourra avorter sans avoir à justifier des motifs qui étayent sa décision. Il ne sera plus alors nécessaire d’attendre l’avis des centres pluridisciplinaires sensés éclairer le jugement de la mère. Au Vatican, Didier Sicard a parlé de "politique de traque qui par ses recherches et examens de cellules fœtales circulantes chez la femme enceinte, tend à l’informer le plus tôt possible de l’identification chromosomique de tel ou tel caractère éventuellement délateur de l’enfant à venir".

Pierre-Olivier Arduin rappelle également qu’une étude de l’Inserm vient de montrer que la plupart des femmes ne sont pas conscientes des implications de ce dépistage (cf. Synthèse de presse du 08/01/09). Devant les membres de l’Académie pour la Vie, Didier Sicard s’est interrogé : "peut-on clairement séparer eugénisme individuel et eugénisme collectif ? Apparemment oui, il n’y a pas de politique d’État ni de volonté d’amélioration des lignées humaines. Mais il y a une politique de santé publique […]. Le résultat est que par son caractère systématique, sa prise en charge collective par l’intermédiaire de l’assurance maladie, se dessine peu à peu le projet d’une naissance sans handicap prévisible ou prédictible […]. Le consensus semble établi qu’un enfant porteur d’une trisomie 21 ou 18 n’a pas vocation à naître".

Pour Pierre-Olivier Arduin, cette question du dépistage ne doit pas être éludée. Au contraire, "elle doit être alimentée par des propositions politiques fortes pour casser l’instauration de ce cercle vicieux". Par ailleurs, il dénonce le basculement de la pratique médicale dans une logique d’obligation de résultats alors que la déontologie médicale est basée sur l’obligation de moyens. C’est d’ailleurs l’une des propositions de Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune, dans son dernier livre : "La trisomie est une tragédie grecque". Il propose que les médecins "puissent conserver l’entière liberté de proposer les tests, en conscience, s’ils les jugent utiles, de même que le bénéfice de ces tests serait accordé aux femmes qui le demandent. De la sorte, on casserait la spirale eugéniste. On n’imposerait pas à qui que ce soit, femme ou médecin, un quelconque ordre moral, mais on éviterait au moins à l’État d’imposer le sien".

Pour conclure, Pierre-Olivier Arduin rend hommage aux parents qui ont fait le choix de garder un enfant qu’ils savaient handicapé.

Enfin, il relaie la suggestion de Jean-Marie Le Méné qui propose : "que soit créé un fonds public pour la recherche à visée thérapeutique sur la trisomie 21. Ce fonds devrait être alimenté par un prélèvement sur le financement du dépistage de la trisomie 21 : un euro pour le dépistage, un euro pour la recherche à visée thérapeutique. Cette économie serait cohérente avec la libération des médecins de leur obligation de proposer les tests à toutes les femmes enceintes. Si le système finançait moins de dépistage, il pourrait financer plus de recherche, il serait donc plus juste".

Liberté Politique.com (Pierre-Olivier Arduin) 13/03/09

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