Pour Laurent Alexandre, chirurgien urologue, président de DNAVision, le désir des parents d’aujourd’hui d’avoir un "enfant parfait" et l’encouragement de la société à "une minimisation des risques obstétricaux" entraînent la sélection des embryons et l’élimination "des fœtus non conformes [qui] deviennent des étapes classiques de toute grossesse ‘raisonnable’ ". Ces constats sont le signe que "nous sommes déjà sur un toboggan eugéniste sans nous en être rendu compte".
Ainsi en est-il de la trisomie 21 "en train de disparaître sous nos yeux" puisque 97% des trisomies 21 diagnostiquées amènent à une interruption médicale de grossesse: "Bien peu de parents résistent à la pression sociale pour ‘éradiquer’ ce handicap mental". Aujourd’hui, "Le diagnostic prénatal permet ‘l’élimination du pire’ […], le diagnostic préimplantatoire […] représente la ‘sélection des meilleurs’ ".
Avec l’arrivée récente du séquençage intégral de l’ADN du bébé par une prise de sang chez la future maman, ce constat eugéniste va s’aggraver: "l’un des derniers freins à la généralisation du diagnostic prénatal – la peur d’une fausse-couche, qui survient dans 0,5 à 1% des cas après une amniocentèse – disparaît".
Face à cette généralisation, Laurent Alexandre met en cause les pouvoirs publics: "politiquement, comment empêchera-t-on les parents de préférer de ‘beaux enfants plutôt doués’ alors que l’avortement pour convenance personnelle est libre, quelle que soit la constitution de l’embryon, et que l’avortement pour handicap intellectuel (trisomie 21 en tête) est légal, socialement accepté et encouragé par les pouvoirs publics?".
En pleine période présidentielle, et face à cette forte sélection des embryons et fœtus, Laurent Alexandre constate que "le retour de l’eugénisme est une bombe éthique et politique passée complètement inaperçue".
Le Monde 07/04/12