Mardi, le Sénat a débattu d’une proposition de loi visant à inscrire un « droit » à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. L’objectif étant de faire de l’avortement un «principe fondamental de notre République». L’occasion de passes d’armes entre sénateurs sur un sujet éminemment sensible.
A l’origine de l’initiative, Laurence Cohen, sénatrice du groupe communiste, qui estime que l’accès à l’IVG en France suscite « des raisons objectives d’être inquiet ». Pourtant, Veronica Noseda, coordinatrice du Planning familial considérait, lors de la publication des chiffres de l’avortement[1], que la France faisait partie des pays où l’accès est « important ».
Pour Jean-Philippe Derosier, professeur de droit constitutionnel à l’université de Lille, « c’est une utilisation purement symbolique de la révision constitutionnelle ». Outre le fait que cette inscription en changerait rien au droit, la Constitution « est notre socle fondamental du pacte républicain, et ne doit pas devenir le lieu d’inscription de toutes les mesures que seule une partie des élus estime essentielle ».
Lors de son intervention à la tribune, Agnès Buzyn, ministre de la Santé et des Solidarités, a estimé qu’il n’est pas nécessaire de constitutionnaliser le droit à l’IVG, jugeant qu’il faut «éviter à tout prix l’inflation législative, a fortiori en matière constitutionnelle». Elle a cependant rappelé qu’elle souhaitait des mesures pour favoriser une «offre accessible, diversifiée et de proximité» et qu’elle envisageait de renforcer « l’information fiable ».
Pour aboutir, l’inscription d’un tel droit dans la Constitution doit faire l’objet « d’une proposition de loi constitutionnelle venue d’un membre du Parlement ». Elle doit ensuite être adoptée par les deux chambres, puis faire l’objet d’un référendum. Sur son site le Sénat indiquait : « Aucun texte n’a franchi toutes les étapes de procédure ».
Pour aller plus loin :
L’avortement ne pourra jamais être un « droit fondamental », ni une « liberté »
La nature de l’embryon humain au défi des lois
[1] 211 900 en 2016, source DREES.
Libération, Virginie Ballet (03/04/2018) ; La Croix, Emmanuelle Lucas (02/04/2018)