CRISPR-Cas9 « permet aujourd’hui de reprogrammer un génome en une semaine au lieu de quelques mois ». Issue d’« un mécanisme naturel de défense existant chez les bactéries », cet outil « permet d’induire des mutations, d’insérer ou d’enlever des gènes ou bien d’inhiber leur expression » dans tous types de cellules. Toutefois, « à ce jour, elle [la méthode] n’est pas fiable à 100% et elle peut entrainer des mutations non désirées dans d’autres endroits du génome ».
Déjà l’objet de « plus de 1000 articles dans des revues scientifiques », CRISPR-Cas9 est une méthode simple, rapide et économique, « déjà utilisée par les étudiants en master de biologie ». Elle serait «aujourd’hui utilisée dans plus de 3000 laboratoires dans le monde ».
Outils génétique « révolutionnaire…et dangereux », CRISPR ouvre des perspectives immenses, mais fait aussi l’objet d’applications « moins nobles ». Toutes sortes d’applications sont envisagées : thérapie génique, reconstitution d’animaux disparus, détournement criminel (transformation génétique de bactérie ou de virus neutres en microorganisme pathogènes), inactivation de gènes pour stériliser des espèces vivantes « vecteurs de maladies nuisibles », modification d’embryons humains dans le but de transmettre de nouveaux caractères génétiques.
CRISPR est donc aussi la source de questionnement éthique : le rassemblement de chercheurs à Washington en décembre 2015 a appelé à « une grande vigilance ». D’autres « groupes internationaux de travail se sont constitués et devraient publier leur réflexion fin 2016 ». En France, l’Académie de médecine et le CCNE devrait « réfléchir à de nouvelles recommandations » dans les prochaines semaines. Pour Hervé Chneiweiss, la principale préoccupation réside dans l’application de CRISPR aux espèces vivantes nuisibles (par exemple les moustiques transmettant le paludisme), car l’impact de la modification de leur génome sur la biodiversité n’a pas encore pu être évalué. Jean Marie Le Méné se montre « prudent » et « distingue l’usage que l’on fait de l’outil », car les modifications génétiques de l’embryon humain pourrait s’apparenter à de l’eugénisme. En outre, « les gamètes doivent rester absolument intouchables » et « devraient avoir un statut ontologique particulier ».