Des chercheurs sud-coréens auraient réussi à produire un embryon humain par clonage. Ils ont ensuite été capables, à partir de cet embryon cloné, de cultiver une lignée de cellules embryonnaires (1).
Les cellules souches embryonnaires sont les cellules d’où proviennent tous les types de tissus de l’organisme. Leur prélèvement est une question sensible sur le plan éthique car l’opération conduit à la destruction de l’embryon. Plus d’une cinquantaine de pays, notamment les Etats-Unis, interdisent ce type de recherche.
Les chercheurs de Séoul ont du faire subir à 16 femmes volontaires au moins deux cycles d’hyper-ovulation pour obtenir 242 ovules ; ils ont utilisé comme noyau à transférer dans l’ovule énucléé, non pas celui de cellule somatique « classique » (cellule de peau par exemple), mais celui d’une cellule de cumulus (cellule de soutien des ovules). Cela engendre des interrogations dans le milieu scientifique ; les chercheurs coréens déclarent ne pas « pouvoir exclure la possibilité d’une origine parthénogénétique des cellules ». Par ailleurs, afin de réunir les conditions les plus favorables au clonage, les embryons ont été obtenus en transférant le noyau dans un ovule énucléé du même donneur.
Scepticisme des scientifiques
Le Dr Rudolf Jeanisch, de l’Institut de la recherche biomédicale Whitehead à Cambridge (Massachusetts) explique que ce clonage « n’a pas d’utilisation concrète à ce stade. Des années de recherches supplémentaires seront nécessaires avant que les transplantations de cellules souches puissent être envisagées sur l’homme ». Il ajoute : « pour l’heure, ce gigantesque déploiement de moyens, de temps et d’argent rend improbable que cette technique constitue jamais une procédure médicale révolutionnaire accessible au plus grand nombre de malades… »
Nicole Le Douarin, secrétaire perpétuelle de l’Académie des sciences explique : « il vaudrait mieux poursuivre les recherches sur les cellules souches, en utilisant des embryons ordinaires, issus de fécondation in vitro ». « Ces scientifiques ont la responsabilité de donner la recette du clonage humain reproductif à tous les apprentis sorciers de la planète », s’inquiète le Professeur Axel Kahn. « Mon pronostic est qu’on annoncera la naissance d’un enfant cloné avant la guérison de quiconque par clonage thérapeutique » déclare-t-il. Pour Jean-Yves Nau, journaliste au Monde « on assiste aujourd’hui à un inquiétant phénomène […] Voilà qu’impuissant nous assistons aux prémices d’une nouvelle expérimentation menée sur l’espèce humaine alors même que rien, à commencer par des recherches sur les animaux, ne permet de le justifier. »
1 – Sciences 12 février 2004