En Chine, deux équipes de recherche distinctes[1] ont réussi à cultiver des embryons de primate[2] jusqu’à 20 jours, relançant ainsi le débat sur la limite de 14 jours actuellement en vigueur au niveau international pour l’expérimentation sur les embryons humains (cf. Recherche sur l’embryon : Sur quoi se fonde la règle des 14 jours ? et Recherche sur l’embryon humain : D’où vient la règle des 14 jours ? ). Les résultats ont été publiés dans la revue Science.
Les deux équipes ont employé une technique consistant à faire croître les embryons sur « une matrice de gel fournissant plus d’oxygène que ne le font les cellules de l’utérus ». Cette technique avait été développée par le California Institute of Technology « qui avait réussi à développer des embryons humains de 13 jours en 2016 » (cf. Des chercheurs développent in vitro des embryons humains pendant 13 jours, et réclament l’autorisation d’aller plus loin). L’équipe menée par le biologiste Ji Weizhi a indiqué que « 46 embryons de singe sur les 200 de leur étude ont survécu 20 jours ». L’autre équipe, menée par le biologiste Li Lei, a atteint cette durée de développement pour 3 embryons. Cette durée de développement traverse « différentes étapes cruciales dont la gastrulation », étape au cours de laquelle les cellules embryonnaires deviennent capables de s’organiser elles-mêmes dans la structure permettant la formation de l’embryon, vers le 14e jour. Les deux équipes affirment que les embryons ainsi cultivés se développent de la même façon qu’in vivo. La prochaine étape ? « Ji Weizhi a déclaré vouloir cultiver les embryons jusqu’au stade où le système nerveux primitif commence à se former, vers le 20e jour ».
Des scientifiques ont utilisé ces résultats pour rouvrir le débat au sujet du délai maximal d’expérimentation sur l’embryon, aujourd’hui de 14 jours. Pierre Savatier, biologiste à l’Institut cellule souche et cerveau à Bron en France envisage d’utiliser cette technique pour cultiver des embryons de singe dans lesquels auront été injectées des cellules souches humaines (cf. Embryons chimères animal-homme : « Ces recherches posent la question de l’avenir de notre humanité »). Ji Weizhi indique qu’une autre équipe de son institut a développé un protocole spécifique aux embryons humains qui devrait être publié prochainement. « Ce système serait adapté pour cultiver des embryons humains jusqu’à 20 jours, mais nous ne prévoyons pas de l’utiliser ».
Pour aller plus loin :
Les embryons chimériques à l’heure de la révision de la loi de bioéthique
Un pas de plus vers la création d’embryons artificiels ?
Recherche sur l’embryon : des scientifiques britanniques remettent en question la règle des 14 jours
[1] The Yunnan Key Laboratory of Primate Biomedical Research, menée par Ji Weizhi et une équipe dirigée par Li Lei, biologiste de de l’Institut de Zoologie de l’Académie des sciences chinoise à Pékin.
[2] Singes cynomolgus.
BioEdge, Xavier Symons (03/11/2019)
Nature, David Cyranoski (31/10/2019)