Au CHU de Liège, le cœur peut désormais être prélevé suite à un arrêt des thérapeutiques

Publié le 21 Nov, 2018

L’équipe de Transplantation du CHU de Liège a réalisé cet été deux prélèvements de cœurs sur des patients en arrêt circulatoire suite à un arrêt des thérapeutiques. Il s’agit d’une « première », car ces donneurs sont en arrêt cardiaque et n’étaient jusque-là prélevés que de leurs reins, foie, et parfois de leurs poumons.[1]

 

Pour cela, l’équipe belge s’est inspirée de travaux publiés il y a 18 mois par des chercheurs américains et britanniques : sur 45 patients en arrêt thérapeutiques et donneurs d’organes, le prélèvement cardiaque et sa greffe « ont montré un succès identique aux dons de personne en mort cérébrale ». A partir de cette étude, les médecins liégeois ont rédigé un protocole visant à contourner la difficulté de tels prélèvements : le « stress de l’ischémie (période où le cœur n’est plus perfusé) », délétère pour les organes. Le professeur Defraigne[2] explique qu’ « en état de mort cérébrale, à cœur battant, il n’y a pas de souci d’ischémie ‘chaude’ préalable : on clampe l’aorte, on perfuse le cœur avec un liquide de conservation froid, ce qui provoque l’arrêt du cœur et le protège, on prélève le cœur que l’on place dans de la glace pour le protéger, puis on le réimplante ». Chez une personne en arrêt cardiaque, le protocole est différent : « le patient est installé au bloc opératoire, où sa ventilation mécanique est stoppée. Suivent une analgésie, puis la sédation de fin de vie. L’arrêt circulatoire dure 15 à 20 minutes. (…) Cette période, dite de « no touch » varie d’une minute trente à vingt minutes selon les protocoles de littérature médicale ». L’équipe liégeoise a décidé d’une phase d’attente de 5 minutes « pour vérifier l’absence ‘d’autoresuscitation’ cardiaque ». Le cœur est ensuite réanimé « à même la poitrine du donneur », à l’aide d’une assistance circulatoire extra-corporelle maintenue durant une trentaine de minutes. A l’issue de ce temps d’observation, le prélèvement est réalisé puis l’implantation chez le receveur.

 

Si ce protocole a obtenu la validation du comité d’éthique, « la question fondamentale demeure » rappelle le professeur Defraigne : « Faut-il pratiquer un arrêt thérapeutique ? », et « ceci en toute indépendance du don ? »

 

Car la pression du « manque d’organes » s’exerce : « il y a de moins en moins de donneurs cardiaques en mort cérébrale. Il y a vingt ans, la moitié des donneurs avait moins de 40 ans ; aujourd’hui, ils sont de plus en plus âgés, avec un risque plus élevé de maladies cardiovasculaires qui ne permettent pas de prélever leur cœur (mais bien les autres organes). Sans assistance cardiaques ni greffon, l’espérance de vie en attente d’un cœur est d’un an. 25% des patients sur la liste décèdent ». Face à ce constat, ce nouveau protocole offre la possibilité de prélever cinq à six cœurs de plus par an au CHU de Liège, trente voire quarante au niveau national.


[1] Les cœurs greffés proviennent de donneurs en état de mort cérébrale.

[2] Chef du service de chirurgie cardiovasculaire et thoracique et professeur ordinaire à l’ULiège.

 

 

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