Les dessous inavoués de la GPA « éthique »

Publié le 23 Fév, 2016

Dans une tribune, Marie-Anne Frison-Roche dénonce avec force les arguments fallacieux qui font la promotion d’une GPA dite « éthique ».

Elle reprend l’analyse économique d’Yves Boivert[1], qui explique que « ‘la GPA éthique’ est une ‘solution imaginaire’ » et qui se demande pourquoi ne pas « franchement » dire que faire de la « GPA éthique », c’est entrer dans une logique de marché et « aller vers la vente des femmes et des enfants ».

 

Marie-Anne Frison-Roche explique que cette langue de bois permet de rendre acceptable aux yeux du public ce qui est loin de l’être d’emblée. Elle reprend l’analyse d’Yves Boivert qui souligne « le caractère contradictoire de telles conclusions qui admettent le mécanisme des mères-porteuse mais, en plus, l’exige bénévole de la part des femmes » au nom d’une « éthique féminine », altruiste, d’une « solidarité entre femmes ». Cette position lui semble « le comble de l’asservissement corporel » : « porter l’enfant d’un autre, c’est un sacré travail ». Pour lui, « on en viendra forcément à une « situation semi-légale », « hypocritement, on fera croire que les contrats sont à titre gratuit ».

 

Qu’en est-il du sort de l’enfant ? Nicole Notat, ex-responsable d’un grand syndicat en France, considère que « la grossesse engage la femme toute entière, qu’elle n’est pas un travail » et elle ajoute que « considérer l’enfant à la seule fin de sa cession consiste à le poser comme une marchandise ». Pour elle, il faut s’opposer « à la volonté des entreprises de construire le marché de ce désir-là, cherchant par divers procès de transformer ce désir d’enfant en droits subjectifs ». Aussi pour atteindre leur objectif, sont-ils prêts à transformer l’image de la GPA : « …avec l’argent en moins. Cette soustraction rendrait l’opération… éthique ».

 
Enfin, pour contourner l’aversion naturelle de l’opinion, « les entreprises, relayées par leurs conseils, médecins et avocats, transforment les acheteurs en innocents et malheureux couples infertiles dont la situation tragique prend enfin fin », et… « Elles font disparaître l’argent ». Pourtant « l’argent est partout, mais les conseils préfèrent ne pas le voir » (cf. Europe : Le conflit d’intérêt sur les questions de GPA n’est pas retenu contre Petra De Sutter). Quand aux femmes, elles sont victimes d’un « mépris absolu » : elles « sont naturellement faites pour se sacrifier et ‘se donner’ ».

 

Comment ne pas se demander, quand le Conseil de l’Europe nomme « un rapporteur qui conseille une clinique qui pratique la GPA commerciale » et qui invite à retenir la « ‘GPA éthique’, reprenant le discours si performants des entreprises avec lesquelles elle a des intérêts convergents », ce qui le pousse à « méconnaitre les droits des femmes » (cf. GPA : Quelle éthique au Conseil de l’Europe ?)

Pour Marie-Anne Frison Roche : « Une réponse explicite est aujourd’hui requise ».

 

[1] L’analyse proposée par Yves Boivert au sujet d’un récent rapport du Conseil du statut de la femme du Québec.

Blog Marie-Anne Frison Roche (20/02/2016)

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