[ESPRIT spécial médecine prédictive] – 2/5 – Nouvelles frontières entre le normal et le pathologique ?

Publié le 16 Juil, 2014
Le numéro de juillet de la revue ESPRIT est consacré aux « spéculations sur la génétique ». Gènéthique passe en revue ce dossier dense et pointu au fil de la semaine à travers les synthèses de 5 articles qui le composent, le sixième ayant déjà été évoqué (Cf. Synthèse de presse Gènéthique du 3 juillet 2014). Aujourd’hui : recherche génétique et perspectives médicales.

 

Pour Franck Bourdeaut, pédiatre et chercheur, si l’association de la médecine et de la « science de la prédiction » « ne va pas de soi », force est de constater que cette dernière « s’immisc[e} dans [l]es missions préventive et curative [de la première] » et « chang[e] les attentes des patients et les exigences des financeurs ».

 

Rappelant l’origine mendélienne de la génétique basée sur le « principe qu’un gène dont un des allèles a subi une mutation pathogène est responsable à lui seul du phénotype pathologique », Franck Bourdeaut souligne que la génétique moderne prend elle en compte les itérations entre le gène muté et l’environnement génétique comme étant aussi des « déterminismes génétiques ».  Ceci introduit nombre de variables qui rendent la pratique prédictive pour le moins complexe.

 

Ainsi, médecins et patients se retrouvent au milieu soit d’une « fatalité désespérante »  soit des « affres des probabilités » alors que les conséquences de la démarche prédictive sont majeures. L’exemple de son usage dans « l’orientation du choix des parents concernant la poursuite ou non d’une grossesse » est particulièrement sensible, d’autant qu’au-delà de la portée personnelle, « l’appréciation même de la sévérité de l’anormalité de l’individu (…) peut concerner toute la société dans l’établissement implicite des normes de sélection des individus ».

 

Dans ce cadre, le séquençage complet du génome, devenu rapide et peu cher, interroge de surcroît, ouvre « de réelles boîtes de Pandore et encombrent d’un savoir éventuellement mal venu ». Qui plus est lorsque cet outil est utilisé à grande échelle en vue de calculer les risques de survenue des maladies fréquentes (études GWAS), entretenant potentiellement une « confusion (…) entre une information à valeur diagnostique et l’estimation d’un risque relatif calculé sur un grand nombre de sujets ».

 

Fondamentalement, la pratique prédictive se situe pour Franck Bourdeaut sur les terrains politique et moral, redéfinissant « des frontières multiples entre le normal et le pathologique,  fondées sur le génome indépendamment même de sa traduction dans le corps. » 

 ESPRIT (Franck Bourdeaut) Juillet 2014

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