40 ans après la loi Veil, un « droit fondamental » à l’IVG ?

Publié le 21 Déc, 2014

Mercredi 26 novembre, 40 ans après l’ouverture des débats de la loi Veil, une centaine de députés a adopté, par 143 voix contre 7, une proposition de résolution « visant à réaffirmer un droit fondamental à l’IVG ». Une heure et demie de discussion générale, où les représentants de chaque groupe avaient été invités à prendre la parole. L’occasion pour les promoteurs de l’avortement de dévoiler leur stratégie afin d’instaurer un droit à disposer de son corps qui, commençant par l’avortement, pourrait se poursuivre avec l’euthanasie.

 

Le texte de la résolution 

La proposition de résolution[1] présentée par la députée Catherine Coutelle, présidente de la Délégation aux droits des femmes, consiste à :

  • Réaffirmer un « droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse »,
  • Rappeler un « droit universel des femmes à disposer librement de leurs corps ».

 

Une résolution sans base juridique

Des juristes rappellent que de telles affirmations sont infondées. En effet :

– L’IVG n’est pas un droit mais bien la dérogation à un principe fondamental réaffirmé par la loi Veil : le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie (art. 16 Code civil).        
– L’IVG ne peut en aucun cas devenir un droit fondamental, puisque « celui-ci n’est reconnu par aucune norme conventionnelle ou constitutionnelle » comme l’a rappelé le député J.Leonetti.

– Le prétendu « droit à disposer de son corps » n’était jusqu’à présent inscrit dans aucun texte juridique. Il s’agit d’une fabrication qui peut être appliquée de manière inquiétante car sans limite. Pourrait en découler l’avortement eugénique, la PMA de convenance, la GPA, le suicide assisté…

Cette résolution « revendique une politique active garantissant et favorisant l’avortement » et consiste « à rejeter hors de l’humanité » l’enfant à naître conclut Guillaume Bernard[2].

 

L’Assemblée nationale en décalage

Ce 26 novembre, l’ambiance était à l’hommage et à la fête dans un hémicycle aux trois quarts vide, pour « célèbrer l’anniversaire » de la légalisation de l’IVG. Mme Veil, Mr Giscard d’Estaing et Mr Chirac, Mme Roudy[3], le manifeste des 343 salopes sont remerciés d’avoir permis la libéralisation de ce « droit des femmes ». J.Leonetti, qui a discuté le contenu de la résolution, conclut de façon étonnante : « Si cette résolution a pour objectif de rendre un hommage à Simone Veil, alors oui je voterai en faveur de cette résolution ».

 

De rares voix se sont élevées

J.Bompard a exprimé une autre voix face à ce consensus imposé par l’absence de débat. Il a été le seul à rappeler notamment que l’avortement concerne en France 225 000 enfants par an qui ne naîtront pas, des femmes soumises au silence, des médecins tiraillés entre leur serment d’Hippocrate et leur pratique. 7 députés, présents dans l’hémicycle, ont voté contre cette résolution : J-F.Poisson, X.Breton, N.Dhuicq, J-C.Fromantin, Y.Moreau, J.Bompard, O.Marleix.

 

Une résolution influente qui s’inscrit dans un travail de promotion de l’avortement et de reconnaissance d’autres droits

Si cette résolution n’a pas de valeur contraignante, elle manifeste un travail déterminé de promotion de l’avortement porté par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh). C’est dans ce cadre que F.Laurant, Présidente de la Commission Santé, droits sexuels et reproductifs, a été auditionnée. Elle a exposé les prochains objectifs : supprimer le délai de réflexion de 7 jours avant un avortement, supprimer la clause de conscience expressément attachée à l’IVG, restaurer l’activité d’IVG dans les établissements de santé qui l’ont arrêtée et l’imposer à tous les établissements disposant d’un service de gynécologie, créer un plan national « sexualité-contraception-IVG » . 
Enfin, cette résolution fait ressortir la stratégie des promoteurs d’un droit à disposer de son corps : P. Boistard appelle à « l’offensive » pour rendre effectif le « droit à l’IVG ». Ce que prévoit la ministre M.Touraine dès Janvier 2015. B.Pompili rappelle que « dautres droits sont à conquérir », pour qu’à l’image de l’avortement aujourd’hui, la PMA, la GPA et l’euthanasie « sonnent comme des évidences. » Elle ajoute à propos de la fin de vie : « Quel sens cela aurait-il de considérer que donner la vie est un choix si nous devions continuer de considérer qu’un individu n’est pas libre d’exercer pleinement [son] ultime liberté ? » 

 

[1]La résolution est un acte par lequel l’Assemblée émet un avis sur une question déterminée. Elle n’a pas de valeur normative, mais reflète l’avis de l’Assemblée sur un sujet donné.

[2] Guillaume Bernard est Maître de conférences (HDR) à l’ICES (Institut Catholique d’Etudes Supérieures). Il enseigne également dans diverses autres institutions comme l’IPLH (Institut Politique Léon Harmel) ou l’ICP (Institut Catholique de Paris). Ses recherches portent sur l’histoire des institutions et des idées politiques. Il a, notamment, codirigé le Dictionnaire de la politique et de l’administration (PUF, 2011). Vous pouvez lire sa Tribune sur Gènéthique.org.

[3] Ancienne ministre des droits des femmes qui a porté la loi sur le remboursement de l’IVG en 1981.

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