Depuis le lancement des débats publics sur ces technologies de l’infiniment petit, le 15 octobre 2009 à Strasbourg, les militants du groupe grenoblois Pièces et main d’oeuvre (PMO) avaient manifesté leur désaccord total aux nanotechnologies, considérant le débat faussé d’avance. Parce que pour eux “participer, c’est accepter“, les membres de PMO ont perturbé la plupart des réunions organisées en France pour débattre des nanotechnologies, au point que certaines, initialement prévues les 9 et 16 février 2010, ont récemment été annulées à Montpellier et à Nantes. Ces opposants considèrent que la Commission nationale de débat public (CNDP) n’est “ni indépendante, ni neutre, ni une instance de débat” mais une “officine vouée à l’acceptabilité des nanotechnologies” qui vise à éviter “une révolte d’opinion contre une technologie imposée“. Ils critiquent ” ‘l’approche technicienne’ qui ne s’interroge jamais sur le bien fondé de telle ou telle technologie nouvelle“. Ils ne s’inquiètent pas seulement du développement de “nouvelles nano-particules, fussent-elles toxiques” mais aussi du danger de “l’avènement d’une société de surveillance et de contrainte” que favoriseraient les nanotechnologies.
En constante évolution, les nanotechnologies tendent à “envahir tous les champs de la vie quotidienne, y compris les domaines de la biologie et de la médecine, avec une infinité de questions à la clé. Ce ‘nanomonde’ mystérieux inquiète“. La peur est que ces technologies soient développées sans contrôle et “sans évaluation suffisante des potentiels dangers, des effets à long terme de ces minuscules éléments, de leur possible combinaison avec des processus biologiques”. Ceux qui s’y opposent ” redoutent qu’impossibles à détecter, ils soient utilisés pour des usages peu compatibles avec les libertés publiques. Ils craignent une fuite en avant irréversible, motivée par l’intérêt économique“. Si le question est bel et bien complexe, l’on peut regretter que le débat ait été ainsi perturbé. C’était pourtant “l’occasion pour les scientifiques, pour les industriels d’expliquer leurs projets, pour les opposants de formuler leur désaccord et pour les observateurs de nourrir leur réflexion“. Pourquoi en effet “déplorer l’opacité des décisions scientifiques, politiques et industrielles et ne pas saisir toutes les chances de les éclairer” ?
Interrogé par le journal Ouest France, Jean-Pierre Chaussade, membre de la CNDP sur les nanotechnologies, affirme que malgré l’agitation et les violences verbales des opposants lors de la tenue des débats, les organisateurs ont “affronté les choses calmement” et que tous les sujets souhaités ont pu au final être abordés. Le bilan de ces réunions est selon lui “tout à fait intéressant” et “la Commission veut maintenant conduire le débat à son terme. D’ici sa clôture le 23 février, nous approfondirons le thème ‘éthique et gouvernance’. […] La société civile nous a dit : ‘on veut être là lorsqu’on parle de développement, utilisation ou recherche sur les nanotechnologies. On veut être partie prenante’. Mais aujourd’hui sur tous ces points, il n’y a rien qui existe. Il n’y a pas de schéma cohérent“. Ce débat était essentiel afin de “définir les conditions de développement, d’encadrement, et de contrôle des nanotechnologies, au plan français et même européen” estime Jean-Pierre Chaussade. Il reviendra au gouvernement de dire la suite qu’il veut donner aux divers points abordés lors du débat public.
Ouest France.fr (Serge Poirot, Jean-Pierre Chaussade, propos recueillis par François Vercelletto) 05/02/10 – La Croix (Dominique Quinio) 05/02/10 – Le Figaro.fr (Thomas Vampouille) 12/02/10