[Tribune] Fabrice Hadjadj “Quel avenir pour l’incurable dans un monde de performance ?”

Publié le 8 Jan, 2015

Fabrice Hadjadj interpelle ses concitoyens sur le sens et la valeur de la vie, au moment où celle de Vincent Lambert, dépend d’une juridiction européenne. “Il faut le reconnaître : depuis qu’on l’a abolie pour les criminels, on ne peut pas s’empêcher de la pratiquer sur des innocents. Sur des enfants trisomiques in utero, par exemple. Mais aussi, – puisque le Conseil d’État en a décidé ainsi, en attendant l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme – sur des personnes diminuées comme Vincent Lambert.”

 

Quelle vie vaut la peine d’être vécue?

 

Dans un monde qui juge la valeur de la vie à l’aune du bien-être et où “tout doit être confortable”, “plus rien ne vaut la peine”, il prend à rebrousse poil ceux qui prétendent qu’une vie diminuée ne vaut pas la peine et il s’interroge : “La vie d’un bébé vaut-elle la peine d’être vécue ? Sans doute, et pourtant ce bébé est faible et dépendant. Est-ce donc seulement à cause de sa future carrière qu’on la juge telle ?” Le philosophe poursuit : “Inversement, la vie d’un consommateur autonome (c’est-à-dire apte à choisir entre McDo et Findus ou même parmi cent programmes télé) vaut-elle la peine d’être vécue?” Et il ajoute encore : “De nos jours, la vie qu’on dit diminuée est celle qui est réduite au plan physique. Mais qu’en est-il d’une vie diminuée au plan moral ? Qu’est-ce qui est le pire d’être Vincent Lambert ou d’être Adolf Hitler en pleine forme ?”

 

Le regard sur la personne diminuée

 

“C’est parce que nous ne savons plus avoir horreur de l’injustice que la souffrance nous apparaît comme le mal absolu”.

Pour Fabrice Hadjadj, “le problème, c’est la situation faite à l’incurable dans un monde de performance économique et technicienne” et si une personne diminuée demande à mourir c’est d’abord parce qu’elle est en “situation de mort sociale” et jugée comme “un déchet non recyclable”.

 

Un ficus à cultiver

 

“Quant à moi, si jamais je devais devenir aussi intelligent qu’une plante grasse, je demande aux miens de continuer à me cultiver et de m’admirer comme un fantastique ficus…”

 

Le Figaro (Fabrice Hadjadj) 07/01/2015

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