La démocratisation des tests génétiques met à rude épreuve le consentement éclairé. Chaque patient doit en effet, après avoir été informé de l’objet de la recherche, explicitement donner son accord. Il le fait par écrit, en présence d’un médecin et sur papier, ce qui, « serait un obstacle notable aux bon développement des analyses génétiques en France », expliquent Guillaume Vogt, généticien et chargé de recherche à l’INSERM et Henri-Corto Stoeklé, bioéthicien et chercheur postdoctoral[1].
Les deux chercheurs estiment que d’un côté les scientifiques ont besoin de « plus de données génétiques pour mieux étudier l’ADN humain » et de l’autre que les personnes sont en quête de « plus d’informations relatives à leur génome ».
Pour permettre aux chercheurs de chercher et à chacun d’être informé, les auteurs proposent la mise en place du consentement dynamique qui ne se fera plus via un support papier mais sera dématérialisé, le propriétaire des données génétiques apposant sa signature sur un smartphone ou une tablette électronique. Ils estiment que ce procédé permettra d’enrichir le consentement « en information, a priori et a postériori », mais surtout « de faire évoluer dans le temps et dans l’espace, l’objet du consentement, mais toujours avec le consentement de la personne ».
Que faut-il comprendre ? Simplement qu’actuellement, les personnes qui donnent par écrit leur consentement pour l’utilisation de leurs données personnelles génétiques, le font en vue d’un projet précis et limité dans le temps. Leurs données sont utilisées uniquement dans le cadre du protocole de recherche pour lesquels elles sont engagées. Ce que souhaitent les chercheurs, c’est pouvoir réutiliser ces données génétiques, toujours pour plus de recherches. Comment les propriétaires de données seront-ils tenus au courant de l’utilisation de leurs données génétiques et des fins des recherches auxquelles elles contribueront ? De plus, quand on sait que le principe d’anonymisation des données est un vœu pieux, le principe même de l’« essaimage » des données laisse rêveur.
Enfin, s’il arrive que la demande créé l’offre, force est de constater qu’à notre époque, l’offre précède souvent la demande et que les efforts du marketing ne sont pas sans effets sur les désirs des consommateurs. L’explosion de la demande de tests génétiques pourrait en être un exemple caricatural. Il semble que les entreprises qui commercialisent ces tests, toujours interdits en France à ce jour, se fondent sur l’émergence d’un nouveau marché générant une croissance à deux chiffres, soit d’énormes profits, distillant l’idée que notre santé serait conditionnée par nos gènes (cf. Fin de l’âme, place au gène ?). Grâce à ces tests, elles constituent aussi d’énormes bases de données valorisables, là encore moyennant finance, auprès des chercheurs… La vraie question quant à ces tests n’est-elle pas de savoir ce qu’attendent vraiment les personnes qui les demandent et surtout, quand on connait le caractère anxiogène de la révélation de maladies potentielles, quel bénéfice en tirent-elles ?
[1] Le Figaro, Tests génétiques : vers un consentement dynamique ?, jeudi 18 février 2019, p. 12.