Recherche biomédicale sur l’homme : révision de la loi Huriet

Publié le 2 Avr, 2003

La directive européenne

En 1988 la loi Huriet-Sérusclat1 avait défini un cadre légal à la recherche biomédicale. Une de ses caractéristiques était de distinguer deux types de recherches : les recherches avec bénéfice individuel direct (BID), et les recherches sans BID. Ces dernières se faisaient selon des conditions strictes et étaient réservées aux personnes pouvant y consentir de manière “libre et éclairée”. 

En 2001 la directive européenne2 relative aux essais cliniques de médicaments donne de nouvelles orientations. Les dispositions transposant en droit français cette directive européenne doivent nécessairement être appliquées au plus tard le 1er avril 2004.

 

La directive européenne supprime la distinction entre les recherches avec BID et celles sans BID pour une notion de “balance bénéfices / risques”. Selon l’article 3, un essai clinique ne peut être entrepris “que si… les risques et inconvénients prévisibles ont été posés au regard du bénéfice individuel pour le sujet participant à l’essai“.

Cette obligation et la nécessité d’améliorer les dispositions de la loi Huriet de décembre 1988 conduisent à l’élaboration d’un projet de révision de cette loi. La loi fait ainsi depuis 2 ans l’objet d’une nouvelle rédaction.

 

Le bilan de la loi

Le 9 mai 2000 Claude Huriet, en sa qualité de rapporteur pour la commission des affaires sociales de la loi du 20 décembre 1988, a fait état de neuf questions concernant le fonctionnement des comités consultatifs de protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales (CCPPRB). Dix ans après la mise en application de la loi, il était temps en effet de réaliser un bilan sur le fonctionnement des CCPPRB, afin d’être en mesure de proposer des améliorations.

 

Un an plus tard, C. Huriet a fait le point sur l’activité des structures mises en place suite à l’adoption de la loi du 20 décembre 1988 grâce aux réponses issues d’un questionnaire envoyé à l’ensemble des comités, accompagné d’un programme d’auditions3. A l’issue de cette consultation, C. Huriet a proposé de revenir sur certains points, dont voici les principaux : clarifier la définition des essais “avec” ou “sans” bénéfice individuel direct, associer davantage les personnes se prêtant à la recherche, reconnaître le conseil des comités, encourager les relations entre les comités et les autres acteurs de la recherche biomédicale, (l’AFSSAPS…).

 

Par ailleurs a circulé une plate-forme de propositions émanant de diverses sociétés savantes, en vue d’obtenir la révision de la loi du 20 décembre 19884. Si l’évaluation des médicaments s’effectue convenablement grâce à cette loi, certains champs d’application tels que la recherche non médicamenteuse sur volontaire sain, la recherche sans bénéfice direct sur patients, la recherche sur patient dans l’incapacité de consentir, les études médico-économiques, les études génétiques, etc., seraient à améliorer.

 

Avant – projet de révision de loi5

Un avant projet de révision de loi a donc été soumis aux partenaires de la recherche biomédicale (CCPPRB, usagers, etc.) afin de recueillir leurs avis dans le cadre du projet de loi sur les “politiques de santé publique” qui devrait être examiné prochainement. L’avant projet, rédigé par le ministère de la santé, prévoit entre autre, la possibilité de recherche sur des patients qui ne sont pas en état de donner leur consentement, avec l’accord d’une personne de confiance. Le régime actuel de déclaration serait remplacé par un régime d’autorisation donnée par “une autorité compétente” avec avis favorable d’un comité d’éthique. 

Le Dr F. Lemaire, chargé par le précédent gouvernement de préparer la réforme de la loi de 1988, est satisfait du texte, tel qu’il est aujourd’hui proposé. C. Huriet, lui, dénonce un “sabotage” de la loi : “les dispositions envisagées ne sont pas assez protectrices“. Il s’oppose à ce que des essais puissent être pratiqués sur des gens hors d’état d’y consentir. Pour lui, la notion de bénéfices-risques “n’a pas de sens” : “on ne peut dire d’avance si une recherche comporte plus de bénéfices que de risques“.

 

1- Loi Huriet 1988

2- Directive européenne 2001/20/CE

3- Rapport d’Information au nom de la commission des Affaires sociales sur le fonctionnement des CCPPRB

4- Révision de la Loi du 20 décembre 1988 : plate-forme commune de propositions émanant des sociétés savantes, organismes et associations de malades. Rev Mal Respir, 2001 

5– Avant-projet de révision de la loi Huriet, 27 mars 2003

 

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