Voilà douze ans que cela était attendu, la “Convention pour la protection des Droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine : Convention sur les Droits de l’homme et la biomédecine” dite “Convention d’Oviedo” a été ratifiée par la France le 13 décembre 2011. Déjà ratifiée par 28 Etats membres du Conseil de l’Europe, le texte entrera en vigueur en France le 1er avril 2012. Il aura alors une valeur supérieure aux lois nationales.
Des principes éthiques fondamentaux inscrits
La Convention d’Oviedo a le mérite d’être le premier texte international donnant comme cadre et repère communs des principes éthiques aux Etats signataires. Elle se donne pour finalité de protéger l’être humain dans sa dignité, son identité, et son intégrité (article 1) face aux évolutions de la médecine et de la biologie.
Il est désormais explicitement inscrit que l’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science (article 2), que toute forme de discrimination d’une personne à raison de son patrimoine génétique est interdite (article 11), que la sélection de convenance du sexe de l’enfant à naître dans les techniques d’assistance médicale à la procréation n’est pas admise (article 14), que la création d’embryons humains aux fins de recherche est prohibée (article 18.1) ou encore que le corps humain, ou ses parties ne peuvent être, en tant que tels, source de profit (article 21).
Monsieur Jean Leonetti, ministre chargé des affaires européennes, se félicite de la ratification de cette convention qui “pose pour lui des principes très forts qui sont à la fois généraux et intemporels” et “assez forts pour protéger l’être humain d’éventuels abus de nouvelles techniques médicales“.
Une protection imparfaite de l’embryon humain
Bien que les principes posés par la Convention d’Oviedo ne soient pas contestables, il est regrettable qu’ils soient ramenés au minimum éthique.
Par exemple, les tests prédictifs de maladies génétiques, sont bien encadrés par la Convention (article 12). Selon le rapport, ces tests “peuvent être très bénéfiques pour la santé, dès lors qu’ils permettent de mettre en place à temps un traitement préventif ou de diminuer les risques“. Or sans aucune justification, le rapport explicatif de la convention exclut l’embryon et le fœtus humain du champ d’application de cet article. De ce fait il ne constitue pas un rempart à la sélection, à la discrimination des embryons atteints de maladies génétiques, et n’encourage pas non plus la recherche de traitements des maladies génétiques dépistables mais non encore curables à ce jour.
En outre, la Convention exige que les Etats signataires autorisant la recherche sur l’embryon, assurent à ce dernier une “protection adéquate“. Le principe est louable, seulement l’expression “protection adéquate” n’est pas définie et est donc laissée à des interprétations plus ou moins permissives.
Enfin, le protocole additionnel portant interdiction du clonage d’un “être humain” laisse aussi cette notion à l’interprétation des Etats. Les Pays-Bas ont donc d’emblée fait remarqué qu’ils n’intégraient pas l’embryon ou le fœtus humain dans l’expression “être humain“.
Par ces trois exemples on peut percevoir que l’embryon est laissé de côté, comme une notion qui gêne, que l’on évite, et finalement que l’on exclut des dispositions protectrices. Il est dommage qu’un texte international ne puisse, à l’exemple de la Cour de Justice de l’Union Européenne dans l’affaire Brüstle c/ Greenpeace relative aux brevets, définir l’embryon humain et le protéger en conséquence.
Un impact limité sur la législation française. La réouverture d’un débat ?
L’impact de cette convention en droit français sera limité. En effet, la législation française n’émet aucune contradiction avec les principes généraux et consensuels de la Convention. Il n’entrainera donc pas de changements significatifs. Cependant, le contexte de l’entrée en vigueur de ce texte sera celui d’une campagne politique nationale. On peut alors s’interroger : Ne serait-ce pas l’occasion d’ouvrir à nouveau le débat sur la sélection des fœtus atteints de trisomie 21, qui font l’objet d’une discrimination à raison de leur patrimoine génétique ?