Proposition Claeys-Leonetti : “Cette loi est anticonstitutionnelle”

Publié le 30 Jan, 2015

Jeudi 29 janvier, la députée du groupe écologiste Véronique Massonneau a déposé une proposition de loi visant à assurer aux patients en fin de vie le droit de mourir dans la dignité. Dans une interview  publiée sur le site du forum européen de bioéthique, Bernard-Marie Dupont, médecin, professeur de philosophie et juriste, met en garde sur le suicide médicalement assisté. Il explique pourquoi le projet de loi Claeys Leonetti, « va trop loin dans le pouvoir accordé au patient ».

 

Le médecin distingue d’abord le suicide médicalement assisté et l’euthanasie, il précise : « Dans le suicide médicalement assisté, l’idée est d’obliger le médecin à arrêter tout traitement, y compris l’hydratation et l’alimentation artificielles du patient de façon à conduire à sa mort. L’euthanasie consiste à autoriser le médecin à faire un geste qui abrègerait d’un coup la vie du patient. Selon moi, cela ouvre la voie à d’énormes problèmes. »

 

Bernard-Marie Dupont souligne ensuite la nature de la demande du patient. Selon lui, « la demande de mort en est rarement une. Pour avoir exercé dans les services de soins palliatifs, je sais que dans 90% des cas, c’est une demande de ne plus souffrir ». Il ajoute que ce n’est pas parce qu’il y a une demande formulée par un patient que la loi doit poser un cadre pour s’y soumettre : « Penser qu’un problème va être résolu en apportant une réponse juridique est un leurre. L’approche humaine est plus adaptée que l’approche juridique qui comporte trop de rigidités. »

 

Ainsi, loin de dénoncer les avancées qui ont été faites, par rapport à la loi Leonetti de 2005, Bernard-Marie Dupont reproche au projet Claeys Leonetti d’aller trop loin dans le pouvoir accordé au patient : « Je ne suis pas favorable au suicide médicalement assisté car, selon moi, cela va provoquer des situations ingérables dans les services médicaux : que faudra-t-il faire quand le patient n’aura pas rédigé ses directives anticipées ? à partir de quand l’hydratation et l’alimentation artificielles seront considérées comme de l’acharnement thérapeutique ? Je pense que cette loi va démultiplier les problèmes et ouvrir les portes à des procès sans fin. Nous n’avons pas fini de voir des procédures comme celle de Vincent Lambert »

 

Favorable à ce que le patient puisse exprimer sa volonté et que celle-ci soit respectée, le médecin rappelle la loi sur l’assistance à personne en danger : « Quand la loi impose d’arrêter tout traitement, d’arrêter l’alimentation et l’hydratation, juridiquement c’est incompréhensible. Le projet Claeys Leonetti dit le contraire de ce qui est inscrit dans une autre loi qui pénalise la non-assistance à personne en danger. Pour moi, cette loi est anticonstitutionnelle. »

 

Et il conclut : « Je suis pour le respect du choix des patients, mais pas au-delà de certaines limites. Le médecin ne devrait pas suivre la volonté du patient quand celui-ci demande à se suicider. Il faut revenir à une solution médiane. Je plaide pour un juste équilibre. »

 

Forum européen de bioéthique – 27/01/2015

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