PJL santé : La commission mixte paritaire échoue et renvoie le texte à l’Assemblée nationale

Publié le 27 Oct, 2015

Ce matin à 9h30, la Commission mixte paritaire du projet de loi santé s’est réunie pour examiner les dispositions restant en discussion. Toutes les dispositions qui n’avaient pas été adoptées « conformes » par les deux chambres lors de leur unique lecture, ont été de nouveau examinées, à huis clos, par les sept députés et les sept sénateurs nommés[1].

 

Après une heure et demie à peine, le tweet d’un journaliste de l’agence de presse médicale annonce que la Commission mixte paritaire est un échec, et que le texte est renvoyé en lecture définitive à l’Assemblée nationale. L’information est confirmée par le bureau de Bernard Accoyer, député Les Républicains, membre de la Commission mixte paritaire.

 

C’est donc l’Assemblée nationale qui examinera en dernière lecture les dispositions restant en discussion, dont certaines comportent des enjeux bioéthiques importants.  

 

Statu quo pour les dispositions à fort impact bioéthique

La commission mixte paritaire n’a donc pas abouti à un consensus sur les dispositions restant en discussion. Elles concernent notamment : l’interruption volontaire de grossesse, le don d’organe, et la recherche sur l’embryon (cf. PJL santé : IVG, don d’organes, recherche sur l’embryon en commission mixte paritaire). Consultez-les sur l’infographie Gènéthique.

 

L’Assemblée nationale va devoir se prononcer sur ces dispositions qui ont fait l’objet d’un rejet par le Sénat :

 

  • – La création d’un nouveau régime de recherche sur l’embryon dans le cadre de l’Assistance médicale à la procréation (AMP) (art.37).
    Par le biais d’un amendement gouvernemental présenté dans l’hémicycle (cf. [Décryptage 1/2] La recherche sur l’embryon s’invite dans le projet de loi santé), l’Assemblée nationale a voté, en première lecture, un nouveau régime de recherche sur l’embryon. Il donnait une base légale à un décret ministériel qui n’en avait pas, et qui avait pour objectif d’élargir ces recherches. Le Sénat l’a rejeté en Commission des affaires sociales (cf. Gènéthique vous informe du 23 juillet 2015). Le fait que le gouvernement se soit abstenu de présenter de nouveau cet amendement en séance, a pu laisser penser qu’il comptait sur la commission mixte paritaire pour introduire, loin du débat démocratique, la « disposition de validation » d’un décret illégal.

Il est à craindre que l’Assemblée nationale élude, comme elle l’avait fait en 1ère lecture, les dérives éthiques de ce nouveau régime de recherche sur l’embryon immédiatement perçues par les scientifiques et qui concernent la création d’embryon pour la recherche, les corrections ou amélioration génétiques de l’embryon (dérives eugénistes et transhumanistes), la FIV à trois parents comme la loi le permet désormais en Angleterre (cf. [Décryptage 2 PLS] Des scientifiques réagissent à propos de la recherche sur l’embryon).

 

Des contrats d’objectifs qui lient les agences régionales de santé aux établissements de santé en matière d’interruption volontaire de grossesse (art.38).  
Cette disposition était portée par la délégation au droit des femmes de l’Assemblée nationale. Elle était présentée sous prétexte d’assurer « un meilleur accès à l’IVG sur le territoire français » et visait à imposer aux établissements de santé des quotas d’IVG. Ces quotas devaient dépasser 20% du total des IVG et des accouchements (cf. Gènéthique vous informe du 12 avril). La encore, il est possible que l’Assemblée nationale tranche, comme elle l’avait fait en première lecture, en suivant l’avis favorable du gouvernement sur cette mesure.

 

–  Le renforcement du consentement présumé au don d’organes (art.46 ter). 

Cette disposition a elle aussi été votée à l’Assemblée nationale par la voie d’un amendement déposé par le député Jean-Louis Touraine. L’objectif était de répondre à la pénurie du don d’organes. Seule l’absence de refus explicite au don d’organe devait permettre d’effectuer des prélèvements d’organes sur le défunt. L’avis des familles ne serait plus pris en compte. Cette disposition ne fait pas l’unanimité des professionnels, qui voient dans cette mesure une violence faite aux familles (cf. Article Gènéthique du 31 aout 2015).

Elle est aussi avancée dans le contexte particulier de la proposition de loi Claeys Leonetti, qui encourage l’arrêt des traitements de maintien en vie, et celui de la pratique Maastrich 3, introduite en France il y a un an, et qui vise à prélever les organes d’un patient dont les traitements de maintien en vie ont été arrêtés et ont provoqué un « arrêt cardiaque contrôlé ». 

 

L’Assemblée nationale se prononcera aussi sur la délivrance de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) médicamenteuse par les sages femmes (plus de détails ici), et sur l’obligation pour les professionnels de santé d’informer sur les méthodes abortives (article 31) qu’elle avait voté en première lecture.

 

Pour connaître les raisons de l’échec de la commission mixte paritaire et avoir connaissance de la date retenue pour la prochaine lecture à l’Assemblée nationale, suivez Gènéthique. 

 

Note Gènéthique :

Pour retrouver d’un coup d’œil les dispositions bioéthiques qui ont été examinées par la commission mixte paritaire, consultez l’infographie.

 

[1] Pour connaître la composition de la commission mixte paritaire, cliquez ici.

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