La naissance du premier « bébé à trois parents », révélée la semaine dernière, devançant sans doute une prochaine publication scientifique, est largement discutée (cf. Naissance du premier “bébé à trois parents” : un précédent dangereux et irresponsable). Si quelques médecins s’enthousiasment du « progrès » de cette situation, nombre de commentateurs s’inquiètent des risques.
Jacques Testart, père du premier ‘bébé éprouvette’, pointe la « présence dans l’embryon ‘normal’ de mitochondrie à ADN muté, apportées dans l’ovule sain en même temps que les chromosomes. Même si, selon les auteurs, elles ne représentent que 5% des mitochondries embryonnaires (et plus tard 1,6% des mitochondries du bébé), on ignore les conséquences éventuelles de cette mixture d’ADN mitochondrial », s’inquiète-t-il.
Il dénonce par ailleurs la position de John Zhang et de son équipe, qui se justifie « en prétendant que l’éthique consiste à sauver des vies » : mais « quelle vie fut sauvée ici ?», interroge-t-il. « Et quel risque fut pris de créer une vie de souffrance ? Comme dans toutes les voies aventureuses qui nourrissent la bioéthique, on doit se demander où placer la limite à l’artifice procréatique, c’est-à-dire reconnaitre qu’il est des situations où l’enfantement n’est pas souhaitable ».
Blanche Streb, directrice des études d’Alliance VITA, voit dans cette expérience une « multiple prise d’otage » :
- de l’information, puisque l’expérience a été tenue « secrète », « en dehors de tout radar réglementaire et éthique » avant d’être « révélé en grande pompe (…), mettant la communauté internationale devant le fait accompli »,
- de l’enfant, « cobaye de la technique qui l’a conçu. Il sera, à vie le test ‘grandeur nature’ de la FIV à trois parents. De nombreuses inconnues pèsent déjà sur lui, quelles seront les potentielles conséquences sur son développement, sur sa santé ? Quelle sera l’empreinte psychologique de cette ‘triple filiation’ et de ces conditions de naissance ? »,
- du couple, « lui-même otage de cet impérieux désir d’avoir un enfant biologique, mais auquel des apprentis sorciers n’ont pu répondre que d’une seule manière : en fabriquant in vitro (…) un bébé OGM (…) Il ne s’agit ni d’un soin, ni d’une guérison ».
Mediapart, Jacques Testart (30/09/2016); Alliance Vita (28/09/2016)