Depuis 6 mois, l’État a été condamné 2 fois pour défaut de scolarisation de personnes handicapées. Condamné à verser 36 000 euros en octobre dernier à un jeune autiste lyonnais, il a dû verser 30 800 euros le mois dernier, à un jeune parisien de 16 ans devenu handicapé mental à la suite d’une méningite. Depuis l’âge de 8 ans, cet adolescent n’ a plus été scolarisé. Sa mère s’interroge encore :
"quel genre de République peut laisser pourrir un enfant dans son lit pendant tant d’années, sans assistance, en marge de tout droit et de toute humanité ?".
Ces actions en justice sont des premières mais d’autres devraient suivre, estime l’Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei). "Gageons que ces succès ne sont que les premiers d’une longue série, et que nos gouvernants comprendront ainsi que le temps de la résignation est passé" explique Laurent Cocquebert, directeur général de l’Unapei.
Rappelons que depuis la nouvelle loi handicap du 11 février 2005, l’État a l’obligation absolue de scolariser tous les enfants handicapés. Cette intégration doit se faire prioritairement en milieu "ordinaire" ou à défaut en établissement spécialisé. Mais la mise en œuvre de cette loi est lourde et complexe. Près de 80 décrets doivent couvrir des problématiques très diverses.
La principale difficulté est l’accueil des enfants handicapés mentaux. 15 000 d’entre eux seraient à ce jour privés de toute prise en charge éducative. Aujourd’hui, la seule solution pour eux semble être un placement en Belgique où 3 000 autistes seraient déjà accueillis. Pour les 137 000 enfants accueillis en milieu ordinaire (sur 240 000 enfants handicapés), le principal problème vient du manque de formation des 60 500 auxiliaires de vie et contrats emploi-vie scolaire qui leurs sont dédiés.
La délégation interministérielle reconnaît que la situation n’est pas idéale "mais c’est une situation très améliorée par rapport à avant" ajoute-t-elle.
Ce n’est finalement pas la question de l’intégration qui est au coeur du débat mais celle de l’apprentissage. L’essentiel dans n’importe quel parcours, est de pouvoir progresser. "Au lieu de se perdre dans de faux débats, privilégions le fond plutôt que la forme : concentrons-nous donc sur les forces éducatives" suggère Jean-Jacques Detraux, professeur en psychologie de la personne handicapée à l’université de Liège. Selon lui, réussir le défi de l’éducation des personnes handicapées implique de réfléchir aux méthodes de formation des enseignants concernés.
Si le problème de l’intégration scolaire des enfants handicapés est balisé, celui de l’intégration dans l’entreprise demeure, lui, semé d’embûches.
Le Figaro (Delphine de Mallevoüe) 29/04/06