Les infanticides néonataux doivent être condamnés

Publié le 26 Nov, 2014

L’infanticide d’enfants survivants à un avortement tardif est pratiqué dans des circonstances inhumaines dans de nombreux pays européens (cf. synthèse de presse Gènéthique 24/11/2014). Suivant que l’enfant prématuré est désiré ou non par ses parents, les médecins feront tout pour le sauver ou le laisseront agoniser, voire le tueront. A la suite de ces pratiques révélées par la presse, le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ) a décidé d’agir pour faire respecter les droits de ces enfants. Avec l’appui des citoyens européens (pétition en ligne) l’ECLJ demande à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe de rendre effectif leur droit à la vie, à l’accès aux soins médicaux (y compris palliatifs) et au respect de leur intégrité physique. Interview.

 

G : Quelle demande avez-vous formulée au Commissaire européen, et à quelle occasion ?

Notre action a commencé en Janvier 2014, avec une question écrite posée sur ce sujet au Comité des ministres du Conseil de l’Europe par le député Angel Pintado. Cette procédure de question écrite est simple mais elle a le mérite d’entrainer de droit une réponse écrite des 47 ambassadeurs, représentant les 47 Etats membres du Conseil. Cette question faisait état de la pratique des infanticides d’enfants nés vivants à la suite d’un avortement tardif, et demandait au Conseil des ministres ce qu’il comptait faire pour garantir le droit au soin, à l’intégrité physique et à la vie de ces enfants abandonnés à la mort, sans soins, ou tués par injection létale ou asphyxie. De tels faits ont été révélés, notamment au Royaume-Uni, en Italie, en Suède et en Norvège. Suite aux témoignages de sages-femmes la Norvège, a interdit en janvier 2014 l’avortement au-delà de 22 semaines de gestation[1] pour éviter que se reproduisent de telles situations.

 

Il faut rappeler en effet que la Cour européenne des droits de l’homme estime que le droit à la vie commence de façon certaine à la naissance, ce qui lui permet de ne pas s’opposer à l’avortement. Or dans le cas d’avortements tardifs, il s’agit d’enfants nés qui sont bien nés vivants. Ils devraient donc bénéficier de la garantie de l’ensemble des droits humains, sans discrimination fondée sur les circonstances de leur naissance comme le prévoient la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention internationale des droits de l’enfant.

 

A la suite de cette question parlementaire, les gouvernements ont longuement débattus. Certains voulaient affirmer que ces enfants prématurés devaient avoir accès aux soins qui leur étaient dus comme toute autre personne, d’autres s’y sont opposés de peur de mettre en cause l’avortement tardif. Mais comme les décisions du Conseil des Ministre doivent être adoptées par consensus celui-ci s’est déclaré dans l’incapacité de répondre à la question écrite, laissant sans réponse la situation de ces enfants.

 

A la suite de cette déclaration, le bureau international catholique de l’enfance (BICE), l’Union mondiale des organisations féminines catholiques (UMOFC), la fédération des associations familiales catholiques en Europe (FAFCE) et le Centre européen pour le droit et la justice (l’ECLJ) ont saisi le Commissaire aux droits de l’homme en lui adressant un rapport (voir le rapport). Ce commissaire est nommé pour promouvoir les droits de l’homme à travers l’Europe en se prononçant sur des situations concrètes qui posent des problèmes d’intérêt général. Mais le Commissaire a refusé de recevoir ces ONG et s’est dit incompétent pour traiter de ce sujet. Il a détourné le regard afin de laisser cette pratique dans l’ombre.

 

G : Comment avez-vous reçu la réponse du Commissaire européen ? Et comment l’interprétez-vous ?

Nous avons été choqué qu’il refuse de nous rencontrer. Quant à l’affirmation que cette question ne relèverait pas de sa compétence, elle est démentie par le fait qu’il a pris position publiquement , le 15 janvier 2014, contre les avortements sélectifs en fonction du sexe, demandant leur interdiction pénale. Par peur de remettre en cause l’eugénisme et l’avortement, il consent tacitement au fait qu’on laisse mourir des enfants, sans soin, pire que s’ils étaient des animaux. Ainsi, le personnel médical est laissé seul face à des situations inextricables où l’enfant survit alors même que les parents n’en veulent pas. Ainsi suivant que l’enfant prématuré est désiré par ses parents, les médecins feront tout pour le sauver ou le laisseront agoniser, voire le tueront. Les médecins deviennent les exécutants de la volonté des parents. Cela va finalement dans le sens de l’avortement postnatal et créé une zone d’ombre que personne ne veut dévoiler.

Il est choquant que le Conseil de l’Europe fasse grand cas de questions telles que la « lutte contre la fessée Â» mais soit incapable de se prononcer sur celle de l’infanticide néonatal. Cet aveuglement volontaire est en réalité le prix à payer au dogme de l’avortement et de l’eugénisme.

 

G : Vous vous inquiétez notamment de la négation de cette violence faite aux enfants quand les animaux bénéficient d’une protection claire.

En effet, les animaux, eux, sont souvent mieux protégés. Des lois expliquent que les animaux sont des êtres sensibles, qu’ils ne doivent pas subir de souffrances inutiles lors d’expérimentations ou à la boucherie. Mais rien n’est prévu pour les enfants qui survivent à un avortement tardif. Par exemple le Collège royal des gynécologues obstétriciens en Angleterre donne des directives[2] sur la prise en compte de la souffrance fœtale des mammifères, mais rien n’est prévu pour la souffrance fœtale des être humains. Les médecins sont donc totalement démunis, ce qui aboutit à des situations d’une violence abjecte.

 

G : Que proposez-vous pour protéger ces enfants de ces « actes inhumains et dégradants Â» ?

Le Centre européen pour la loi et la justice (l’ECLJ) a décidé de saisir l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour que ses députés se saisissent de ce sujet, suivant une procédure prévue au règlement de l’Assemblée. Afin d’avoir du poids et ne pas être écartée, cette demande doit être soutenue par de très nombreuses personnes. D’où notre initiative de pétition que vous pouvez retrouver et signer ici. L’objectif de notre action est d’exposer au grand jour ces pratiques inhumaines pour y mettre fin.

 

[1] Seuil de viabilité de l’OMS

[2] Directive relative à la souffrance des animaux utilisés à des fins scientifiques Â« Il convient que la présente directive s’applique aussi aux formes fÅ“tales des mammifères, car certaines données scientifiques montrent que ces formes, dans le dernier tiers de leur période de développement, présentent un risque accru d’éprouver de la douleur, de la souffrance et de l’angoisse, qui peuvent aussi affecter négativement leur développement ultérieur. Il est aussi démontré scientifiquement que des procédures appliquées à des formes embryonnaires et fÅ“tales à un stade de développement plus précoce peuvent occasionner de la douleur, de la souffrance, de l’angoisse ou un dommage durable si on laisse vivre ces formes au-delà des deux premiers tiers de leur développement.»

Grégor Puppinck

Grégor Puppinck

Expert

Grégor Puppinck est Directeur de l'ECLJ. Il est docteur en droit, diplômé des facultés de droit de Strasbourg, Paris II et de l'Institut des Hautes Études Internationales (Panthéon-Assas).

Partager cet article

Textes officiels

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres