Des chercheurs de l’université technique de Munich (TUM) ont développé une méthode pour fabriquer un organoïde de cœur, à partir de cellules souches iPS humaines. Ce « mini-cœur » est destiné à étudier la première phase de développement de notre cœur[1] et à faciliter la recherche sur les maladies. Ces travaux ont été publiés dans la revue Nature Biotechnology[2].
Des organoïdes d’un nouveau type
La technique mise au point par l’équipe d’Alessandra Moretti, professeur de médecine régénérative dans le domaine des maladies cardiovasculaires, permet d’obtenir des organoïdes d’environ un demi-millimètre de diamètre. Bien qu’ils ne pompent pas le sang, ils peuvent être stimulés électriquement et sont capables de se contracter comme des cavités cardiaques humaines.
En outre, ces organoïdes, baptisés « épicardioïdes », sont composés à la fois de cellules du muscle cardiaque (cardiomyocytes) et de cellules de la couche externe de la paroi cardiaque (épicarde). Jusqu’à présent les chercheurs n’étaient parvenus qu’à créer des organoïdes ne contenant que des cardiomyocytes et des cellules de la couche interne de la paroi cardiaque (endocarde). Or, « pour comprendre la formation du cœur, les cellules de l’épicarde sont décisives », précise Anna Meier, premier auteur de l’étude. « D’autres types de cellules dans le cœur, par exemple dans les tissus de connexion et les vaisseaux sanguins, sont formés à partir de ces cellules. L’épicarde joue également un rôle très important dans la formation des cavités cardiaques », ajoute-t-elle.
Comprendre le développement du cœur
L’analyse de cellules individuelles a permis de déterminer que des cellules précurseurs, d’un type récemment découvert chez la souris, se forment vers le septième jour du développement de l’organoïde. L’épicarde est formé à partir de ces cellules, ce qui pourrait permettre de comprendre pourquoi le cœur du fœtus est capable de s’autoréparer, une capacité presque totalement absente du cœur d’un être humain adulte. Et, par la suite, aider à trouver de nouveaux traitements pour les crises cardiaques et d’autres pathologies. Après s’être penchés sur le syndrome de Noonan[3], l’équipe prévoit d’étudier dans les prochains mois d’autres malformations cardiaques, en utilisant des « organoïdes personnalisés ».
Complément du 31/08/2023 : Une équipe de chercheurs israéliens affirme avoir créé un « minuscule cœur battant » de la taille d’« un tiers de grain de riz ». Il s’agit du premier modèle de cœur cultivé à partir de cellules souches [4] « doté de toutes les structures essentielles [5] », affirme le professeur Yaakov Nahmias, qui a dirigé les recherches. Auparavant les « modèles » n’étaient que « des amas de cellules musculaires cardiaques ». Les chercheurs ont publié leurs travaux dans la revue Nature Biomedical Engineering [6].
Leur étude porte notamment sur l’activité métabolique. En examinant des « milliers de petits cœurs », ils ont pu constater que « l’activité métabolique du cœur oscille, ou change, très rapidement, en quelques millisecondes ». Des changements « ultrarapides » couplés à l’activité électrique du cœur et non mécanique.
Les scientifiques mettent en œuvre un système robotique développé par la société Tissue Dynamics. Ils peuvent ainsi produire et manipuler 20 000 organoïdes humains à la fois, et mener « un très grand nombre d’études en parallèle ». D’ici deux ans, ils envisagent de travailler avec des organoïdes cérébraux.
Complément du 26/02/2024 : Des chercheurs de la Michigan State University coordonnés par Aitor Aguirre ont publié leurs derniers travaux sur les organoïdes de cœur dans les revues Nature Communications et Stem Cell Reports. Ils sont développés à partir de cellules souches pluripotentes provenant d’adultes. « De taille et de développement similaires à ceux des cœurs humains fœtaux, ces mini organoïdes cardiaques deviennent de plus en plus complexes et réalistes. » Ces recherches récentes ont notamment porté sur l’utilisation de ces organoïdes « pour étudier les effets du diabète maternel à chaque étape du développement du cœur du fœtus », explique Aitor Aguirre.
[1] Le cœur humain commence à se former environ trois semaines après la conception.
[2] Meier, A. B., et al. (2023). Epicardioid single-cell genomics uncovers principles of human epicardium biology in heart development and disease. Nature Biotechnology. doi.org/10.1038/s41587-023-01718-7.
[3] Maladie rare, très variable et multisystémique, principalement caractérisée par une petite taille, une dysmorphie faciale caractéristique, des anomalies cardiaques congénitales, une cardiomyopathie et un risque accru de développer des tumeurs pendant l’enfance (source : orpha.net)
[4] iPS
[5] des ventricules, des oreillettes, un épicarde (enveloppe extérieure), un endocarde (revêtement intérieur) et des stimulateurs cardiaques naturels
[6] Ghosheh, M., Ehrlich, A., Ioannidis, K. et al. Electro-metabolic coupling in multi-chambered vascularized human cardiac organoids. Nat. Biomed. Eng (2023). https://doi.org/10.1038/s41551-023-01071-9
Sources : News Medical, Emily Henderson (05/04/2023) ; Times of Israël, Renee Ghert-Zand (09/08/2023) ; Medical Xpress, Michigan State University (24/02/2024) – Photo : iStock