Un an jour pour jour après le rapport du Conseil d’Etat qui avait explicitement ouvert la voie, le Premier ministre a indiqué qu’il était favorable à l’expérimentation sur l’embryon et au clonage humain.
S’agissant de l’expérimentation sur l’embryon, les raisons invoquées sont l’amélioration des techniques de la procréation médicalement assistée et la recherche de nouveaux traitements à partir de cellules souches. Pourtant il faut rappeler que les études sur la stérilité, si tel est le mal que l’on veut combattre, doivent porter en priorité sur les gamètes et non sur l’embryon. Ensuite, l’expérimentation sur l’embryon, si c’est cela que l’on veut faire, reste possible sur l’animal mais peu pratiquée pour des raisons financières. Enfin, le recours aux cellules souches adultes qui persistent dans tous les individus a été l’occasion des progrès les plus récents et les plus spectaculaires, et ne pose aucune difficulté éthique. De surcroît annoncer, comme l’a fait le Premier ministre pour justifier son choix à l’encontre « des motifs tenant à des principes philosophiques, spirituels ou religieux » que « des enfants immobiles pourront enfin se déplacer, des hommes et des femmes brisées pourront enfin se redresser » est pour le moins prématuré.
L’autorisation du clonage humain par le Premier ministre a relevé d’un jeu sémantique inattendu. « Avant tout clarifions le débat : réservons le terme clonage au clonage reproductif. Celui-ci est interdit. Il le demeurera. » a-t-il précisé avant d’annoncer que la loi pourrait néanmoins autoriser la création d’embryons humains par « transfert de cellules somatiques », c’est à dire en fait par clonage, dit thérapeutique. Mais le mot n’a pas été prononcé. Comme l’ont souligné de nombreux commentateurs dans la plupart des journaux, cette précision n’a rien clarifié du tout. Par définition, tout clonage reproduit un être humain, que celui-ci soit épargné pour devenir une copie conforme ou sacrifié pour devenir un médicament. Telle était d’ailleurs la position du Parlement européen après le feu vert donné au clonage humain par Tony Blair. Quand le Premier ministre français n’interdit que le clonage reproductif, il postule que le transfert de noyau est éthiquement acceptable parce qu’il n’est pas scientifiquement du clonage. Or il s’agit bien de clonage…
Si les prochains débats bioéthiques doivent reposer sur cette « base scientifique », il y aura beaucoup à attendre du spectacle médiatique et beaucoup à perdre pour la science.