Le Dr de Bourayne n’a pas commis d’euthanasie

Publié le 17 Fév, 2005

En octobre 2000, le Dr Joël de Bourayne de la clinique de la Martinière de Saclay était mis en examen pour "pratiques euthanasiques" sur une vingtaine de patients entre juin 1995 et juillet 2000. Le médecin avait été accusé par l’une des salariés de la clinique d’avoir provoqué la mort de ses patients en leur administrant des "cocktails de sédatifs". C’est l’inspection du travail, convoquée suite à un conflit social interne à la clinique, qui avait alerté le procureur de la République d’Evry.
La clinique La Martinière, établissement de soins de 120 lits réservés aux militaires et leur famille, accueille un certain nombre de patients très âgés et d’autres en phase terminale de cancer.

Après l’expertise médicale des dossiers, l’instruction a retenu 9 cas potentiellement suspects. Le Dr de Bourayne a expliqué avoir administré ou fait administrer des produits analgésiques à ses patients en fin de vie et notamment des cocktails DLP (mélange d’un antalgique, d’un neuroleptique ou d’un sédatif) pour "abréger les souffrances" mais sans intention d’euthanasier. Il témoigne : "je n’ai pas compris ce qui m’est arrivé. Être accusé d’euthanasie correspondait à une rupture complète avec mes idéaux". Il explique que la clinique de Saclay était amenée à accompagner des malades jusqu’à la mort du fait du manque de structures de soins palliatifs. "Au départ, on prenait ce que l’on avait. J’ai utilisé le DLP pendant un an et demi puis l’arrivée des seringues électriques nous a permis d’avoir recours à la morphine ; cela nous a énormément aidés pour atténuer les souffrances et assurer la dignité du patient".

Hier, le juge d’instruction du tribunal de grande instance d’Evry, Jean-Wilfrid Noël, a rendu une ordonnance de non-lieu général innocentant ainsi le Dr de Bourayne. Le procureur, Jean-François Pascal explique "nous nous sommes fondés sur deux éléments. Tout d’abord, il n’a pas été établi formellement, malgré les nombreuses expertises, un lien de causalité entre les produits injectés, leur dosage et la mort des patients, qui étaient des personnes très âgées en fin de vie. Et il est ressorti de l’enquête et des témoignages l’absence d’intention homicide de la part du médecin". Pour le Pr Christian Richard, président de la société française de réanimation de langue française (SRLF) : "ce type de cocktail est susceptible de hâter la survenue de la mort, mais il ne s’apparente pas à ces substances qui, elles, provoquent à coup sûr le décès".

Dans son ordonnance de non-lieu, qui a fait exceptionnellement l’objet d’un communiqué dans la presse, le juge d’instruction explique que le médecin "loin de se livrer à des pratiques euthanasiques criminelles, a inscrit son action dans une démarche de soins palliatifs".

Le Dr Joël de Bourayne se dit "profondément meurtri" par l’accusation qui lui a été portée et entend déposer une plainte pour dénonciation calomnieuse à l’encontre de l’ancienne salariée qui l’a accusé d’euthanasies.

La proposition de loi sur les droits des malades et la fin de vie, votée en première lecture à l’Assemblée nationale en novembre dernier, sera discutée au Sénat le 12 avril prochain. Plusieurs amendements ont déjà été déposés. Le député Jean Leonetti, à l’origine de la proposition de loi, a proposé un amendement visant à "rendre licite l’administration d’un traitement destiné à soulager la douleur, au risque d’abréger la vie, à la double condition d’assurer une totale transparence à l’égard de la famille et de recourir à une procédure écrite, établissant que le traitement a été donné en toute connaissance de cause". Marie Humbert et l’association Faut qu’on s’active ont déposé un "amendement Frédéric Chaussoy" afin de permettre "dans un nombre limité de cas, d’arrêter les souffrances par une aide active à mourir" en introduisant "dans le code pénal une exception d’euthanasie".

Le Monde (Sandrine Blanchard) 17/02/05 – La Croix (Marianne Gomez) 17/02/05

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