Journée nationale de l’infertilité : les paradoxes de la PMA

Publié le 7 Nov, 2016

Une petite centaine de couples, professionnels de santé et femmes célibataires participaient vendredi à la journée nationale de l’infertilité sponsorisée par le magazine MagicMaman, le laboratoire Merck, RTL, le site deuxièmeavis.fr et l’association Maïa. L’objectif affiché par les organisateurs était d’ « informer sur les troubles de la fertilité ». Une information à fort parti pris, celui de « faire bouger les lignes » autour de la PMA, avec un faible argument maintes fois rabâché : pourquoi interdire en France ce qui se fait ailleurs, particulièrement en Espagne ?

 

Les intervenants ruminent : la « PMA en France est en ‘souffrance’ », les professionnels doivent faire face à une « pénurie de moyens », « notre pays n’est plus à la pointe ». Ils appellent de leurs vœux une réorganisation du système et un élargissement des indications de la PMA aux femmes célibataires et aux couples de femmes. Une voix isolée rappellera tout de même qu’en France, « le système prend en charge à 100% les parcours de PMA » : un point fort selon elle, car dans d’autres pays « plus à la pointe » en matière de techniques, la PMA est inabordable pour 90% de la population.

 

Le constat de l’impact environnemental sur la fertilité est alarmant, mais la recherche dans ce domaine ne suscite pas d’intérêt. Serait-elle moins lucrative que la PMA ? Par ailleurs, le recul de l’âge de la première grossesse chez les femmes est préoccupant, et nécessiterait une meilleure politique de santé familiale. Le dépistage de l’endométriose n’est pas systématique, il est pourtant aujourd’hui la principale cause d’infertilité. Son traitement n’est, quant à lui, pas pris en charge à 100 %.

 

Les représentants espagnols du groupe IVI, enviés par leurs homologues français, reconnaissent qu’ils ne « font pas de miracles », et regrettent la « méconnaissance du grand public des limites de la PMA » : chez l’animal, les mêmes techniques marchent à 98%, alors que l’on rencontre près de « 75% d’échec chez l’homme » commente une psychanalyste française. Les espagnols présents dénoncent une « vision déformée de la fertilité des femmes », une « presse rose qui normalise les grossesses à 40 ans », et une mauvaise information sur « les risques obstétricaux chez les femmes de plus 40 ans ». Les PMA avec don d’ovocytes aboutissent également à des grossesses risquées, notamment un risque de pré éclampsie[1] de 30%, aggravé avec l’âge. Des considérations qui inquiètent peu certains médecins qui appellent à revoir la limite d’âge fixée par la loi française pour la PMA (43 ans). « La médecine a-t-elle vocation à satisfaire le souhait d’une femme d’allonger son temps de fertilité ? » s’interroge un gynécologue, qui y répond sans plus de réflexion par la positive.

 

A ces limites s’ajoutent un parcours douloureux, contraignant, éprouvant. Le risque d’isolement du couple est évoqué par un psychiatre, ainsi que la dissociation du corps de la femme par la PMA : son corps est malmené, il est vu comme un ennemi ; elle ne vit pas vraiment ce qui se passe à l’intérieur d’elle-même, elle regarde un écran lors du transfert embryonnaire : « la conception qui aurait dû avoir lieu en son sein, a lieu à l’extérieur », explique une sophrologue.

 

Entre le constat d’une pratique aléatoire et nocive tant pour la santé des femmes, leur rapport à l’enfant, leur coût écologique important et la volonté farouche d’abolir toute condition à la pratique de la PMA, les paradoxes sont nombreux. Les couples infertiles venus assister à ces conférences y auront-il trouvé une once de réconfort ? Ils repartiront sans doute persuadés que la France « est à la traîne », mais munis des ‘bonnes adresses’ espagnoles, et sommés de faire un don pour aider les centres français à se doter d’incubateurs dernier cri.

 

[1] La pré-éclampsie est une maladie fréquente de la grossesse, associée à une hypertension artérielle et à l’apparition de protéines dans les urines. La plupart des patientes accoucheront d’un bébé en bonne santé et se rétabliront rapidement. Toutefois, non traité, ce syndrome entraîne de nombreuses complications qui peuvent conduire au décès de la mère et/ou de l’enfant.

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