Jean-Claude Ameisen: animer “une réflexion éthique dans la société”, mission du CCNE

Publié le 25 Nov, 2012

Dans un entretien publié dans le supplément "science et techno"  du quotidien Le Monde, Jean-Claude Ameisen, nouveau président du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), explique en détail le rôle et le devenir qu’il entend donner à l’institution. 

A l’approche des 30 ans d’existence du CCNE (février 2013), Jean-Claude Ameisen précise qu’il "attache une grande importance à la mission" du comité, à savoir, celle "d’anim[er] une réflexion éthique dans la société". En effet, alors que "les avancées scientifiques et les questions éthiques qu’elles soulèvent sont souvent traitées par les médias dans un contexte d’urgence", le président du CCNE explique que "le rôle [de cette autorité] est de prendre du recul, de dégager les enjeux, d’explorer et de présenter les différentes options qui permettront aux citoyens de s’approprier la réflexion et de s’exprimer à partir d’un ‘choix libre et informé’. Un processus au coeur de la démarche éthique biomédicale, et essentiel à la vie démocratique". 
Pour J-C Ameisen, si "l’expertise biologique et médicale est indispensable", elle "n’est pas suffisante" car "le respect de la personne est en jeu". Ainsi, il rappelle que le CCNE, autorité "indépendant[e] et transdisciplinaire", est composé de 40 membres, et plus précisément de médecins et de biologistes mais également de philosophes, d’anthropologues, de sociologues, de juristes, et de "quatre membres choisis pour leurs appartenances aux grandes familles spirituelles et religieuses". En outre, il souhaiterait que se joignent à ces membres des économistes, car pour Jean-Claude Ameisen, ces derniers "aideraient […] à mieux prendre en compte les facteurs socio-économiques et environnementaux qui ont une influence sur l’espérance de vie et la santé", […] "à mieux apprécier la dimension économique des choix de politique de santé, avec les risques d’exclusion ou d’abandon qu’ils sont susceptibles d’induire", et "à analyser les effets des politiques économiques nationales et internationales sur la santé". 

Afin de "pouvoir faire entrer davantage la réflexion éthique dans la société civile", le président du CCNE explique qu’ "il y a sûrement un travail pédagogique important à faire pour que les démarches scientifiques et éthiques deviennent des composantes à part entière de notre culture", en tentant notamment de "rendre [des] avis non pas plus simples, mais parfois plus clairs". Pour J-C Ameisen "il n’y a pas de forme idéale d’animation de la réflexion publique. Il faut croiser différentes approches. Et les inscrire plus souvent dans une dimension internationale". Pour "mieux élaborer [les] réflexions", il faudrait "faire participer des comités d’éthiques d’autres pays, notamment européens", cela permettrait "de mieux comprendre en quoi et pourquoi nous pouvons souvent faire, à partir des mêmes questions éthiques, des choix différents". 

A la question de savoir si le CCNE pourrait être plus réactif dans ses avis, J-C Ameisen répond que si "une grande réactivité est utile dans certains cas", il "pense que là n’est pas le rôle essentiel du comité", ajoutant qu’ "enfermer le CCNE dans un rôle de lanceur d’alerte ou de réponse d’urgence serait lui oter ce qui fait l’originalité de sa mission", à savoir "réaliser une analyse originale et approfondie". Il explique: "Nous vivons dans une culture de l’instantané, nous manquons souvent de recul. La plupart des avis du CCNE ont demandé plusieurs mois de réflexion, parfois des années".
"A six reprises entre 1984 et 2001, le CCNE a recommandé un régime d’autorisation encadrée des recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires – sans avoir été suivi par le législateur". Mais pour J-C Ameisen, "le CCNE est une autorité indépendante consultative, il ne peut ni ne doit se substituer aux choix du législateur et de la société". Il ajoute: "Le rôle principal du CCNE me semble être de faire ressortir la complexité des problèmes, leurs enjeux, les contradictions éventuelles, et de clarifier au mieux les possibilités de choix […]. Il est souvent arrivé que le législateur traduise très rapidement des recomandations du CCNE dans la loi. Même alors, l’existence d’une réflexion publique qui permette à la société de bien comprendre et de participer à ces choix demeure importante". 

 

Le Monde – Supplément science et techno (Florence Rosier) 24/11/12

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