Dans l’hebdomadaire La Vie, Jean Leonetti, ministre chargé des Affaires européennes, membre de l’UMP et ancien rapporteur de la loi sur la fin de vie d’avril 2005, a réagi à la proposition 21 du candidat socialiste François Hollande sur l’euthanasie. Il appelle les citoyens français à un débat apaisé sur cette problématique.
Jean Leonetti revient sur les mots utilisés par le candidat, les qualifiant de "flous" et soulignant qu’ils ne signifient "rien d’autre que la légalisation de l’euthanasie". Il estime que l’ambiguïté de la formule vise à "envoyer un signal positif aux partisans de l’euthanasie sans inquiéter les autres".
Le ministre livre une analyse du véritable sens de la proposition de François Hollande. Cette dernière dispose que "toute personne majeure en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable, et qui ne peut être apaisée, puisse demander dans des conditions précises et strictes à bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité" (proposition 21).
– Jean Leonetti observe que s’il s’agit de "terminer sa vie dans la dignité", et d’être médicalement accompagné pour ce faire, alors "la proposition n’apporte rien de plus que les pratiques recommandées et la législation en vigueur". En effet, la loi sur le droit des malades et la fin de vie qui encadre les soins palliatifs constitue "une réponse adaptée à ce problème", même si "la loi et la culture palliative tardent à entrer dans les mœurs et dans la pratique".
Quant à la notion de "dignité", il rappelle qu’elle ne peut "se limiter à l’estime de soi qu’on lit dans le regard de l’autre", mais qu’elle est intrinsèque à "la personne humaine elle-même, comme le rappellent tous les textes constitutionnels ou internationaux".
– L’encadrement de cette pratique "par des conditions strictes et précises", invoquées par François Hollande, s’inscrit dans une "même ambiguïté". L’appréciation du caractère "insupportable" d’une "souffrance physique ou psychique" ne permet pas de limiter l’euthanasie à des cas exceptionnels. Cette proposition reviendrait à ouvrir un "nouveau "droit à"".
– Le ministre souligne également l’importance de préciser la "circonstance essentielle" de la mort demandée par une personne en phase terminale ou par quelqu’un qui pourrait encore avoir de "longs mois, voire des années à vivre et qui pourrait donc changer d’avis". Il fait remarquer que cette demande "intervient peu dans la phase terminale, dès l’instant où le malade est correctement pris en charge". Mais pour le cas d’une personne "paraplégique qui ne supporte plus son existence", d’un malade "dépressif chronique" ou "atteint d’une maladie d’Alzheimer", cette pratique "s’apparente alors au suicide assisté". Loin de l’ "exception d’euthanasie", "on voit bien dès lors pourquoi des extensions et des dérives se produisent dans les pays qui ont dépénalisé l’euthanasie"
Pour Jean Leonetti, quand "on connait la législation en cours qui accepte au nom du double impératif de "non abandon" et de "non souffrance" d’arrêter les traitements salvateurs et de prodiguer calmants et antalgiques, même si cela doit hâter la mort", on comprend que la proposition de François Hollande n’est pas "un pas vers l’euthanasie", mais bien la légalisation du fait de "donner la mort à un malade qui le demande".
Le ministre chargé des Affaires européennes souhaite un "débat citoyen apaisé" et espère que les citoyens "décèleront la réalité qui se cache derrière l’hypocrisie des mots" : "S’ils souhaitent l’apaisement de la douleur et un accompagnement humain en fin de vie, ils refuseront la violence de la mort donnée aux plus vulnérables".
La Vie.fr 06/02/12