Handiphobie : la Justice française aussi ?

Publié le 8 Nov, 2005

Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune, premier financeur de la recherche en France sur la trisomie 21, réagit dans le journal La Croix au jugement du TGI de Reims (cf. revue de presse Gènéthique du 11 octobre 2005), qui admet l’indemnisation des deux frères aînés d’une petite soeur trisomique.

"A quand l’indemnisation de la grand-mère, de la tante, des cousins, de la femme de ménage et du voisin de palier ?", s’indigne-t-il.

Face à l’argument du juge selon lequel l’arrivée de la petite soeur trisomique a bouleversé la vie de ses deux frères, il réplique : "Sans doute, et alors ? Toute naissance – et au-delà, toute irruption d’un tiers dans votre vie –  apporte un bouleversement".

De même l’argument selon lequel la mère a consacré moins de temps à ses premiers enfants du fait de la présence de leur soeur le fait réagir vivement : "A ce compte-là, toute naissance nouvelle fonderait à demander réparation pour le temps volé aux autres enfants. Les familles nombreuses seraient des concentrés d’inégalité !"   "Quelle pitié de voir le temps – donc l’amour – maternel traité de façon malthusienne, comme on traite le travail en France, assimilé à un gâteau à partager entre bénéficiaires de plus en plus pauvres et revendicatifs."

Le dernier argument du juge avance que la naissance de la petite soeur est un des facteurs du divorce des parents. Jean-Marie Le Méné trouve qu’il est "un peu simpliste de rendre l’enfant trisomique responsable". Il retourne l’argument : "Cela signifierait-il que l’avortement de l’enfant handicapé est un facteur d’harmonie familiale et de paix sociale ?"

Le handicap est "la première cause de discrimination en France, devant l’âge ou l’origine ethnique", rappelle-t-il, ainsi que le dénoncent les "calicots gigantesques" qui flottent sur la place de l’Hôtel-de-Ville de Paris. Doit-on s’en étonner quand la justice rend elle-même un jugement handiphobe ?

Le président de la Fondation Jérôme Lejeune s’insurge contre cette décision "d’injustice" rendue au nom du peuple français. «Jamais je ne me reconnaîtrai dans un "peuple français" – virtuel – au nom duquel on rend ces décisions de justice handiphobes qui font de l’enfant trisomique le bouc émissaire, responsable de tous les malheurs du monde», conclut-il.

La Croix 07/11/05

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