En 2002, le vote de trois "lois relatives à la fin de vie", par le Parlement Belge, visait à répondre à trois objectifs. Selon le professeur Etienne Montero, doyen de la Faculté de droit de Namur et Président de l’Institut européen de Bioéthique, le législateur cherchait alors à "sortir l’euthanasie de la clandestinité, garantir qu’un médecin la pratique et garantir le respect de la volonté du patient". Après de nombreux débats, la loi a rejeté l’ouverture d’ "un droit à l’euthanasie" mais consacré un "droit à la demande d’euthanasie" : la volonté du patient est mise au premier rang.
La loi a posé les conditions suivantes : seuls les médecins peuvent procéder à un acte d’euthanasie après avis d’un autre médecin indépendant, sur un patient majeur ou mineur affranchi de l’autorité parentale, conscient, se trouvant dans une situation médicale irréversible faite de "souffrances physiques ou psychiques constantes, insupportables et inapaisables" ou sur un patient inconscient et sans perspective de rémission, mais ayant rédigé une "déclaration anticipée" depuis moins de cinq ans.
La loi a également créé une commission fédérale de contrôle et d’évaluation : à partir des déclarations obligatoires des médecins, celle-ci est chargée de vérifier la conformité des procédures suivies. En cas d’irrégularité, elle se doit de demander des précisions, voire de recourir à la justice. Mais "dans ses rapports réguliers aux chambre législatives", la commission rapporte "qu’elle n’a pas la possibilité d’évaluer la proportion du nombre d’euthanasies déclarées par rapport au nombre d’euthanasies réellement pratiquées". Selon le professeur Etienne Montero, la commission ne fait qu’enregistrer, elle "reste tributaire de la déclaration des médecins et interprète la loi de manière très souple, notamment pour évaluer la notion de souffrance psychique".
Si certains médecins se refusent à "dépasser l’interdit du meurtre", laissant d’autres médecins la réalisation de l’euthanasie, d’autres demandent à aller plus loin et envisagent, entre autres, la prise en charge de patients qui ne seraient pas en phase terminale. Ainsi, il avait été proposé, en 2010, d’étendre la loi aux mineurs et aux personnes démentes ou incapables d’exprimer leur volonté.
S’il ne semble pas qu’une révision soit à l’ordre du jour dans l’immédiat, certains médecins généralistes craignent une "évolution dangereuse" car "il y a toute une génération, éduquée à la performance, qui angoisse à l’idée de devenir un jour un poids pour ses proches et pour la société". Ces médecins s’alarment d’une "médiatisation qui présente parfois l’euthanasie presque comme un droit individuel, exigible auprès du corps médical".
La Croix (Raphaëlle d’Yvoire)12/03/12