En Espagne, l’Assemblée plénière de la Chambre civile de la Cour suprême a statué en matière de gestation par autrui. Un jugement « unanime » qui porte deux messages : il s’agit d’une pratique « qui viole la Constitution, les lois nationales et les conventions internationales », et, placé devant un « fait accompli », la solution doit être l’adoption.
Ce jugement fait suite à un appel du ministère public contre un jugement du tribunal de grande instance de Madrid. La Cour madrilène avait ordonné qu’une femme ayant commandité une GPA au Mexique soit inscrite à l’état civil en tant que mère. Le tribunal avait fondé sa décision sur le fait que cette femme « s’acquittait depuis un certain temps des obligations qui sont celles d’une mère » [1].
Une condamnation sans équivoque
L’arrêt consacre plusieurs pages à dénoncer la maternité de substitution. Une pratique qui « entraîne une atteinte inacceptable à l’intérêt supérieur de l’enfant et une exploitation de la femme », où « tous deux sont traités comme de simples objets ». Le texte souligne que « le contrat impose à la mère porteuse “des limitations à son autonomie personnelle et à son intégrité physique et morale incompatibles avec la dignité humaine”, tandis que le futur enfant, “privé du droit de connaître ses origines, est traité comme un objet d’échange, “chosifié” ».
En conséquence de quoi, le contrat ne peut être considéré que comme « nul et non avenu » en droit espagnol, car « il viole la loi sur la procréation assistée, la Constitution et la Convention relative aux droits de l’enfant ».
Face au fait accompli : l’adoption
Cependant la Cour reconnaît « la réalité » : des agences font de la publicité « librement » en Espagne, et des enfants nés à l’étranger par GPA arrivent sur le sol espagnol. Dès lors elle recommande que la mère commanditaire ait recours à l’adoption. Une « solution » qui « tente » de « sauvegarder » les droits fondamentaux de l’enfant et des mères en général.
La Cour suprême espagnole ne s’était prononcée qu’une seule fois sur la GPA. En 2013, elle avait rendu un arrêt rejetant l’inscription à l’état civil d’un enfant né par GPA en Californie. Les commanditaires voulaient transposer ce qui avait été inscrit sur le registre d’Etat civil californien. La tentative que vient de rejeter la Cour suprême voulait passer cette fois par le droit espagnol.
[1] filiation dite par possession d’état dans le code civil
Source : El Mundo, Manuel Marraco (05/03/2022)